Fraude fiscale, blanchiment, corruption : le si controversé chef de la diplomatie israélienne risque 31 ans de prison.
31 ans de prison. C'est ce que risque Avigdor Lieberman, le chef de la diplomatie israélienne. Après une enquête menée durant une décennie ( ! ), la police israélienne a demandé dimanche 2 août au procureur général israélien, Menahem Mazouz, de se prononcer sur l'éventuelle inculpation du ministre.
Lui sont reprochés : fraude fiscale, blanchiment d'argent et corruption. Des malversations qui portent sur près de 2 millions d'euros qu'il aurait touchés illégalement. Selon la presse locale, il aurait reçu ces sommes pour financer ses campagnes électorales via des sociétés écran basées à Chypre.
Avigdor Lieberman a immédiatement réagi déclarant qu'il dormait la consience tranquille :
« J'ai passé en revue toutes mes réponses aux interrogatoires, et je me sens en paix avec l'ensemble de mes actions. Je referai absolument tout ce que j'ai fait jusque-là. »
Il a assuré qu'en cas d'inculpation, il abandonnerait son poste de ministre, celui de leader du parti d'extrême-droite Israel Beitenou et son mandat de député, rajoutant :
« Je suis certain que dans un an ou deux je serai toujours président de parti et ministre des Affaires étrangères. Et les prochaines élections nous donneront 20 sièges (son parti a obtenu 15 sièges aux dernières élections, ndlr). » (Voir la vidéo)
Ex-bagagiste et videur de boîte de nuit
Ce natif de Kichinev, petite ville de Moldavie, n'en est pas à ses premiers démêlés avec la justice. Souvent soupçonné mais jamais inculpé, Avigdor Lieberman a toujours accusé ses détracteurs de vouloir se débarasser de lui parce qu'il est de plus en plus populaire en Israël.
Ex-bagagiste et videur de boîte de nuit, il est arrivé en Israël à la fin des années 70, où il connut une ascension politique fulgurante à grands coups de déclarations fracassantes. Après un passage par le Likoud, le parti de Benjamin Netanyahou, Avigdor Lieberman fonde Israel Beitenou, « Notre maison », qui remporte 4 sièges à la Knesset en 1999.
Depuis les élections législatives du 10 février, ce parti ultranationaliste, qui rassemblait à l'origine les immigrants issus d'Europe de l'Est opposés aux négociations de paix, est la troisième force politique du pays avec 15 députés sur les 120 siégant au Knesset.
Celui que l'on surnomme le Cosaque est parvenu à fédérer grâce à un discours extrêmement hostile aux Arabes israéliens, au point de réclamer la mise à mort de ces « traîtres ». (Voir la vidéo, en anglais)
Propulsé chef de la diplomatie du pays, l'homme gêne ses homologues étrangers au point que c'est à Ehud Barak, ministre de la Défense, qu'échoit la mission de mener les discussions avec les Etats-Unis et les pays arabes.
Sarkozy refuserait de le recevoir
Les critiques fusent contre ce ministre des Affaires étrangères belliqueux et ultranationaliste. Les médias israéliens ont notamment révélé au mois de juin -provoquant une jolie pagaille diplomatique- que Nicolas Sarkzoy avait conseillé au Premier ministre Benjamin Netanyahou de renvoyer Avigdor Lieberman. Il aurait déclaré qu'il n'était pas prêt à le recevoir à l'Elysée.
Dans un article consacré à « l'inutilité » de Lieberman à la tête de la diplomatie, le quotidien Haaretz souligne que les déclarations du président français ne sont pas isolées et que plusieurs gouvernements étrangers sont consternés par Lierberman. Haaretz rapporte cette anecdote :
« Lors de sa rencontre avec Bernard Kouchner, Lieberman a dit que la croissance naturelle des colonies en Cisjordanie devait continuer, donnant en exemple la pénurie de crèches dans sa ville de Nokdim.
Kouchner a cyniquement répondu que, contre cette pénurie, les enfants de Nokdim n'avaient qu'à aller dans les crèches des Palestiniens. Ce à quoi Lieberman a répondu “ils n'ont pas de crèches et même si c'était le cas, nos enfants n'en reviendraient pas vivants. Kouchner n'était visiblement pas amusé”. »
Lors de cette visite en France, une manifestation anti-Lieberman a été organisée près du Quai d'Orsay. (Voir la vidéo)
Le quotidien Haaretz se scandalise de son maintien au gouvernement dans un édito intitulé « Pourquoi attendre ? » :
« Israël, qui est sur la défensive sur la scène internationale et doit se confronter à la possibilité de renouer des négociations sur la paix avec les Palestiniens, a besoin d'un ministre des Affaires étrangères à la stature internationale, soutenu politiquement. Pas d'un suspect. »
Alors, partira, partira pas ? Pour l'heure, Lieberman s'accroche à son poste. Selon le Jerusalem Post, s'il venait à démissionner, Dany Ayalon, député et membre du parti « Israël Beitenou » pourrait le remplacer aux Affaires étrangères. Pas de grand séisme politique en vue donc.
Des précédents nombreux
Ce n'est pas la première fois qu'un membre éminent de la classe politique israélienne est épinglé par la justice.
ll y a un an, le chef du gouvernement, Ehud Olmert, démissionnait suite à des accusations de corruption. Les ministres de la Justice, Haïm Ramon, et des Finances, Avraham Hirshson, ont démissionné l'un pour un attentat à la pudeur, l'autre pour corruption. Le président Moshé Katzav a lui aussi été poursuivi pour harcèlement sexuel.
[1] http://en.wikipedia.org/wiki/Avigdor_Lieberman
[2] http://fr.wikipedia.org/wiki/Israel_Beytenou
[3] http://tempsreel.nouvelobs.com/actualites/international/20090727.OBS5540/george_mitchell_poursuit_son_marathon_diplomatique_en_e.html
[4] http://www.haaretz.com/hasen/spages/1096504.html
[5] http://www.haaretz.com/hasen/spages/1098031.html
[6] http://www.haaretz.com/hasen/spages/1105068.html
[7] http://www.jpost.com/servlet/Satellite?cid=1249223905116&pagename=JPost/JPArticle/ShowFull
[8] http://en.wikipedia.org/wiki/Danny_Ayalon
[9] http://www.rue89.com/2009/05/06/lieberman-sous-les-huees-au-quai-dorsay
[10] http://www.rue89.com/2009/02/11/elections-en-israel-tzipi-livni-en-tete-mais-un-pays-ingouvernable
[11] http://www.guardian.co.uk/world/2009/aug/03/avigdor-lieberman-israel-corruption-charges
[12] http://www.haaretz.com/hasen/spages/1105068.html
[13] http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2009/08/04/le-chef-de-la-diplomatie-israelienne-soupconne-de-blanchiment-d-argent_1225548_3218.html
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