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Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur.










Saturday, October 03, 2009

Parcours de personnalité / Philippe Fehmiu , un grand symbole de la diaspora afro-canadienne …

30-09-2009

Philippe Fehmiu est un acteur majeur de la vie culturelle, artistique, littéraire, et du développement interculturel du Canada et de tout l’espace francophone. Cet homme de communication, passionné des TIC et du septième art a surtout un grand intérêt pour les questions communautaires.
Toujours en mouvement entre les questions sociologiques, culturelles, artistiques des diasporas africaines du monde entier, la journaliste indépendante Patricia TURNER – que nous ne vous présentons plus - a rencontré, il y a quelques semaines, Monsieur Philippe Fehmiu, pour notre grand bonheur. Un entretien exclusif, d'un grand intérêt, à bâton rompu.
SIKAINFO ...

Propos recueillis par Patricia Turnier, journaliste indépendante et légiste (détentrice d’une maîtrise en droit, LL.M).

PARCOURS :

Philippe Fehmiu a grandi au Québec. Il a reçu l’éducation de sa mère présentement retraitée et ex-adjointe corporative pour une firme d’avocats dans la Belle Province. Philippe Fehmiu est aussi le fils de Paul F. Brown, grand spécialiste de l’histoire des Afro-Canadiens. Cet homme a beaucoup inspiré Fehmiu. Il l’a introduit dès son enfance à la culture générale en lisant à voix haute ses écrits tout en demandant à ses enfants d’apporter les corrections qui s’imposaient. Cette année Philippe Fehmiu était le parrain de la 19e édition du festival de musique Multi-Montréal pour une deuxième année consécutive. Ce festival fondé en 1990 fait la promotion du rapprochement multiculturel où plus de 75 pays ont été représentés via la prestation de nombreux artistes.

Le 17 avril dernier à l’Impérial, Philippe Fehmiu et Marie-Ange Barbancourt ont animé la soirée de gala du festival montréalais consacré aux cinématographies africaines et créoles, Vues d’Afrique (riche de 130 œuvres telles que la production de Mathieu Kassovitz, Johnny Mad Dog projeté au Festival de Cannes en 2008, des productions de Nollywood, etc) qui franchissait le cap du quart de siècle.

Philippe Fehmiu anime actuellement les émissions Fréquence libre à la radio de la Société d’État Radio-Canada. Tout d’abord, il a débuté chez Météomédia en 1991 où il s’occupait des bulletins radiophoniques au niveau de la météo tout en faisant des reportages en tant que pigiste pour RDS. Ensuite, il a prêté sa voix sur les ondes de CJMS pour devenir après acteur dans diverses séries télévisées (de 1991 à 1993) telles que Jasmine. Par la suite, il a été VJ (vidéo jockey) à Musique Plus (le MTV québécois) de 1993 à 1997. Après, il s’est retrouvé derrière les caméras où il a réalisé divers magazines télévisés. Il a été aussi animateur au Canal Z, à Réveil avec Philippe Fehmiu à la radio de Radio-Canada et à l’émission Le Lab à Vox. En sus, il a occupé le rôle d’animateur sur les ondes radiophoniques de CKOI au courant de sa carrière et a participé à l’émission Tu m’étonnes! produite par Zone 3 sur TV5. La renommée de Fehmiu a atteint le summum lorsque TQS l’a licencié de son poste d’animateur de Loft Story. Monsieur Fehmiu est un homme qui a le courage d’afficher sans ambages les valeurs, les positions et les idées qui lui semblent justes. Élevé dans la fierté d’être noir, empreint d’une grande conviction, ne craignant aucunement de se tenir debout, durant l’automne 2005 il a fait savoir sur les ondes qu’il refusait de continuer à travailler avec le psychiatre controversé Dr Mailloux (co-animateur de Loft Story) ayant dit des propos inappropriés, impropres, immondes, empiriques (sans fondement scientifique) sur l’infériorité du quotient intellectuel des Noirs et des Amérindiens. Suite à cet événement, d’autres réseaux de télévision impressionnés par l’attitude méritoire de Fehmiu ont proposé des projets intéressants à l’animateur. Ce dernier est un homme engagé qui prête son nom à différentes causes philanthropiques telles que l’Association d’Anémie falciforme du Québec et le Centre jeunesse de Montréal. A cet égard, au printemps 2009, Philippe Fehmiu a animé la troisième édition du spectacle-bénéfice du Centre jeunesse de Montréal-Institut universitaire. Cette soirée a mis sur scène des artistes s'engageant à appuyer la cause des enfants et des jeunes les plus en détresse de la société. Il a ouvert un restaurant Robin des Bois (http://www.robindesbois.ca/) où les profits sont versés aux organismes communautaires.

Philippe Fehmiu porte ainsi plusieurs chapeaux et est un adepte des nouvelles technologies. Il est à la fois artiste, animateur, réalisateur, producteur, « développeur » de contenus interactifs, documentariste et directeur de développement corporatif.
Cet homme est d’une simplicité désarmante et dénué de toute prétention. Il a une belle personnalité et il est ouvert sur le monde. Il parle trois langues: français, anglais et espagnol. Nous avons rencontré l’animateur le printemps dernier à la Société d’État Radio-Canada où nous avons découvert notamment diverses facettes de son parcours professionnel.

P.T. Monsieur Fehmiu, vous avez grandi au Québec au village Ste-Thècle. Dans quel univers avez-vous évolué durant votre enfance? Est-ce depuis cette époque que vous avez développé un vif intérêt pour travailler plus tard dans l’industrie du divertissement?

P.F. J’ai effectivement développé un grand intérêt pour le domaine du divertissement en raison du fait d’avoir vécu à Ste-Thècle. A cet endroit, je me trouvais au centre d’une petite communauté considérée de façon symbolique comme un village. Là-bas, tout le monde se connaît. Si quelqu’un a un problème, les gens se mobiliseront pour lui porter secours. Le citoyen est réellement situé au centre de la communauté. J’ajouterais que mes parents ont joué des rôles divers dans ce village. Par exemple, ma mère est celle qui a participé à la fondation de la Maison des jeunes de Ste-Thècle. Dès ma jeunesse, j’ai donc été en contact avec l’impact que les citoyens peuvent avoir dans la communauté par le biais de leur engagement collectif. Ils ont le pouvoir de briser certaines barrières en mettant sur pied des projets par exemple. Je me suis rendu compte que j’ai toujours voulu faire une différence dans l’environnement dans lequel je vivais. Il importait pour moi d’avoir cette capacité de changement. Par conséquent, j’ai pensé qu’en ce sens, les médias représentaient une excellente plate-forme car ils permettent d’occuper ce rôle de façon plus percutante. Le fait que mon père soit auteur m’a également influencé. Son jet de crayon avait une grande portée. J’ai compris très jeune le pouvoir des mots ayant la capacité de véhiculer des messages mobilisants. Dès cette découverte, ce fut très clair pour moi que je souhaitais me retrouver dans les médias.

P.T. On mentionne souvent que les médias sont le quatrième pouvoir.

P.F. Effectivement. A l’âge de 12 ou 13 ans, j’ai lu les classiques de Marshall McLuhan (grand sociologue canadien et théoricien de la communication) « Pour comprendre les médias » et « Message et massage ». Cet auteur fait état de l’importance du pouvoir à travers les médias. Ce sociologue et déterministe technologique parlait du village global dans ses ouvrages. J’ai compris cette idéologie à un jeune âge, plus spécifiquement au début de l’adolescence.

P.T. Vous avez longtemps chéri le rêve durant votre tendre jeunesse d’œuvrer dans le domaine audiovisuel. Quelle personnalité québécoise et américaine rêviez-vous de rencontrer en tant que VJ à Musique Plus et dont vous avez eu la chance d’interviewer?

P.F. Je n’avais pas ce rêve de rencontrer une personnalité en particulier. Cela ne faisait pas partie de moi. Il est certain que j’ai vu des gens vraiment intéressants mais je ne suis pas impressionné par les personnes travaillant particulièrement dans ce secteur plus que dans un autre.


P.T. Pour vous, était-il important de vous retrouver dans ce milieu pour changer les choses?

P.F. Cela a toujours effectivement été ma première motivation. En étant dans les médias, j’aime occuper le rôle de courroie de transmission entre ce réseau de communication et le public. Je suis dans le domaine depuis maintenant 20 ans. Cette sphère m’appelle également à m’impliquer au-delà de mon métier en m’engageant auprès de diverses associations et groupes. Par exemple, j’appuie depuis 1994 le centre jeunesse de Montréal. Au début de la création de Robin des Bois, organisme à but non lucratif, je me suis adressé aux médias pour faire connaître ce restaurant afin de favoriser le financement. Ce projet se serait plus difficilement concrétisé si les médias n’avaient pas été utilisés. Je travaille donc dans le domaine de la communication pour pouvoir avoir un impact sur ma communauté.

P.T. Depuis 2008 vous animez l’émission Fréquence libre. A qui s’adresse ce programme et qui est votre clientèle?

P.F. Notre programme s’adresse aux gens qui aiment la chanson partout au pays. Nous répondons à un auditoire appréciant la grande musique francophone qui a jalonné notre histoire. Notre émission s’adresse aussi aux gens souhaitant suivre l’actualité.

P.T. Vous avez été en Guinée, il y a quelques années et plus spécifiquement à Conakry. Pouvez-vous nous parler de cette expérience?


P.F. Il s’agit d’une expérience qui a été très forte pour moi. Suite à ce voyage et après notre passage au Sénégal, ma conjointe de l’époque et moi avons décidé de créer le restaurant Robin des Bois. On a vu la pauvreté à Conakry. Pourtant, on a rencontré des gens, des familles qui vivaient des moments de bonheur malgré leur indigence. J’ai vu des personnes vivre dans des huttes en terre battue avec un bol de riz (comme seul repas de la journée) à partager avec d’autres. Cette situation ne les empêchait pas d’avoir un sourire. Ce sont des images fortes. Ces Guinéens ont l’esprit communautaire en d’autres mots de groupe. Ce fut une grande leçon de vie pour nous. Nous avons davantage pris conscience qu’en Occident, l’aspect matériel prime et nous essayons de nous en départir parce que ce n’est pas l’essentiel. Au fait, je ne dis pas que les besoins primaires ne comptent pas mais cela prend un équilibre et il faut éviter les excès. J’ai réalisé l’importance de revoir les fondements du capitalisme surtout avec la crise actuelle due essentiellement à la surconsommation. Mon voyage à Conakry a eu lieu en 2006 et à ce moment il n’était pas nécessaire de « requestionner » ce système économique. En 2006, on parlait plutôt de développement économique et on prônait que la consommation effrénée garantissait le bonheur. Mais, mon expérience en Afrique a provoqué un grand éveil en moi et ma réflexion sur ce régime économique avait déjà débuté. Mes observations en Guinée contrastaient beaucoup avec ce que je voyais en Amérique du Nord.



P.T. Vous avez dans le passé été en Afrique pendant trois mois avec votre conjointe de l’époque et productrice Judy Sevray tourner un documentaire portant sur les musiciens africains. Pouvez-vous nous parler de cette réalisation?

P.F. Au fait, on était présent là-bas afin d’effectuer une recherche pour le documentaire et non pour le tournage. On a voulu se rendre sur place pour se documenter notamment sur le legs et le savoir en ce qui a trait à la musique africaine. J’ai utilisé ces informations pour faire après des capsules pour le Canal Évasion. On a eu aussi la collaboration de ma sœur qui travaille pour le CECI et qui vit en Afrique.


P.T. Le festival Vues d'Afrique: PanAfrica international (http://www.festivalpanafrica.com/) a fêté cette année ses 25 ans. Vous avez animé le 17 avril dernier la soirée de gala dont Son Excellence la très honorable gouverneure générale du Canada, Mme Michaëlle Jean a assuré la présidence d’honneur. Comment avez-vous vécu cette expérience et que représente pour vous ce festival?

P.F. Ce fut une expérience remplie d’émotions pour moi. Lorsque je suis arrivé à Montréal vers le début des années 90, j’accompagnais mon père à ce festival. Cela représentait un événement assez novateur dans notre ville et apportait quelque chose de 100% exotique. Cela a donné la possibilité aux Montréalais de voir des films d’ailleurs : de la Martinique, de la Guadeloupe, d’Haïti, du Sénégal, etc. Plusieurs réalisateurs (des documentaires présentés) ont voyagé, se sont rendus au continent africain. Ce festival permet ainsi à la population de se tourner vers les Antilles et l’Afrique. Cet événement consiste en une tribune d’échanges.

C’est donc un honneur pour moi que 25 ans après la création de ce festival on m’a choisi afin d’animer la soirée d’ouverture. Ce festival au fil des années m’a apporté beaucoup de richesse et de découverte. Le fait d’être parrain a représenté une occasion de redonner ce que j’ai reçu. Je porte en moi un métissage culturel. Je suis fier des mes origines québécoises et de ma mixité. Le 25e anniversaire fut donc une opportunité d’exprimer à la fois mon « africanité » et mon identité québécoise. J’ai invité mon père à être présent pour cette édition. Évidemment, la présence de la très honorable gouverneure générale Mme Jean a ajouté un caractère spécial à l’événement. Il s’agit d’une dame qui est vraiment importante pour notre pays. Elle irradie l’élégance, une grande classe, une haute finesse et une grande ouverture d’esprit. Nonobstant son titre, elle demeure accessible et très généreuse de sa personne. Lorsque je me suis retrouvé sur la scène pour animer la soirée, j’ai trouvé le public montréalais très beau et cosmopolite. Des gens de partout sont venus célébrer « l’africanité ». C’était un moment vraiment magique. La soirée s’est terminée tard. Je me suis donc couché tard et le lendemain quand je me suis réveillé j’étais très heureux. Je lève mon chapeau par rapport au fait que ce festival ait pu exister pendant 25 ans. Cela n’a pas toujours été facile.


P.T. Vous avez été mis en nomination dans la catégorie personnalité masculine de l’année au Gala Soba le 1er mars 2009. Cette distinction signifie quoi pour vous?

P.F. [Silence] La signification n’est pas perçue de façon strictement personnelle. Ce n’est pas moi qui importe dans tout cela. Il est certainement plaisant de se retrouver dans la même catégorie que d’autres personnalités telles qu’Herby Moreau ou Anthony Kavanagh possédant de grandes qualités. Les gens mis en nomination ont tous été mutuellement influencés de part et d’autres. Curieusement, les gens de l’extérieur peuvent penser qu’on est en compétition entre nous mais on se complète et on continue à s’entraider.

Ce qui me touche aussi surtout c’est que Montréal se soit doté de cette tribune pour saluer et tout simplement rassembler les gens issus des communautés culturelles ce qui enrichit le paysage médiatique. Le gala hors ondes fut aussi agréable que la soirée en question. Le Gala Soba permet de souligner la contribution des gens issus des communautés culturelles du Québec dans les médias. On devient effectivement plus nombreux par contre, je constate qu’il manque encore une chose. Je fais référence à la quasi-absence des accents à la télévision. La seule personne qui possède un accent est Boucar Diouf dans l’émission « Des Kiwis et des hommes » à qui Radio-Canada a ouvert ses portes. Il a un accent sénégalais.

P.T. J’ai à peine remarqué qu’il avait un accent.

P.F. J’imagine que vous côtoyez souvent des gens qui ont un accent. Vous êtes donc habituée. Les Québécois de souche comprennent très bien Boucar Diouf. Ses billets pour ses spectacles se vendent très bien. Ma conjointe qui est latino, Maria Sanz et moi avons animé une émission sur Canal Évasion qui a très bien marché. Le programme a été numéro 1 pendant plus d’un an au Canal Évasion. Les auditeurs la comprenaient. Il existe donc une barrière qui n’a pas lieu d’être. On constate un décalage entre la représentation des gens issus des communautés culturelles à la télévision et ce que l’on voit dans la rue. Pourtant, la diversité peut faire gagner des grandes parts au marché médiatique. Il existe des décideurs qui perdent des occasions d’affaires en or. Il y a des gens qui ne regardent pas la télévision car ils considèrent qu’on ne s’adresse pas à eux en raison du manque de diversité.

P.T. J’ajouterais que le manque de diversité va au-delà des communautés culturelles. On ne voit pas par exemple des handicapés, des personnes âgées, des gens ayant de l’embonpoint et d’autres personnes faisant partie intégrante de notre société.

P.F. Tout à fait. J’espère donc voir dans le futur plus d’ouverture en ce sens sur la scène médiatique. Il importe d’avoir un reflet plus réaliste de ce qu’est le Québec d’aujourd’hui. Un plus grand métissage dans le paysage audiovisuel serait souhaitable.


P.T. Si je résume bien pour vous le Gala Soba représente la diversité et la célébration du pluralisme.

P.F. Tout à fait et je le vois comme un lieu d’échange où les gens disent : « on vient de loin, on a fait du chemin ». Il ne faut surtout pas oublier que nos parents ont fait un grand parcours.
Les gens issus des communautés culturelles ont pris leur place sur la scène médiatique québécoise depuis une vingtaine d’années. Avant, c’était plus difficile et même parfois un handicap. Actuellement, on peut faire plus facilement sa place si on a du talent.

P.T. Du 17 au 25 avril dernier vous avez été parrain de la 19e édition du festival Musique Multi-Montréal (www.musiquemultimontreal.com). Vous avez occupé cette fonction pendant deux années consécutives. Votre implication auprès du festival représente quoi pour vous ?

P.F. Je considère que je représente une courroie de transmission entre ces artisans de la musique et le public. Le rôle que j’occupe consiste donc à être un ambassadeur et un porte-parole. J’ai donc incité des citoyens à assister à ce festival offrant des spectacles de grande qualité artistique où l’on entend entre autres des instruments provenant d’ailleurs. De plus en plus, le public montréalais souhaite entendre des sons différents. Depuis une vingtaine d’années, je côtoie les musiciens montréalais et on a considéré que j’étais bien placé pour occuper le rôle d’ambassadeur.

P.T. Il vous tient à cœur de vous engager dans diverses activités sociales telles que l’Association d’anémie falciforme du Québec, le Centre jeunesse de Montréal, Téléthon Opération Enfant Soleil. La philanthropie signifie quoi pour vous?

P.F. Pour moi, c’est tout à fait naturel de faire partie intégrante de sa communauté. Je considère avoir beaucoup reçu dans la vie et je pense qu’il est important de redonner à la communauté. Cela m’est arrivé d’avoir fait autant de bénévolat que d’heures rémunérées dans la même semaine. Par exemple, lors de l’ouverture de Robin des Bois je me suis plus impliqué bénévolement que de façon rémunérée pour mon emploi. Je crois fondamentalement qu’il faut donner pour recevoir. Il est certain que cela me nourrit de me retrouver avec des gens qui souhaitent faire une différence dans la communauté. Il s’agit de personnes partageant le même système de valeurs que moi. Parfois, la ligne est très mince pour moi entre mon passe-temps et le bénévolat. J’ai donc beaucoup de plaisir à m’impliquer. A travers les associations où je suis membre, je rencontre des gens qui sont atteints de maladies sérieuses qui ont développé une force intérieure. Ces personnes sont très inspirantes pour moi.

P.T. Vous êtes devenu le premier président du conseil d’administration du restaurant à but non lucratif Le Robin des Bois. Pouvez-vous nous parler de ce restaurant?

P.F. J’ai travaillé très fort pour implanter Robin des Bois. Il s’agit d’une initiative permettant de remettre la totalité des profits aux organismes sans but lucratif en milieu urbain. J’ai décidé d’être président du conseil d’administration afin d’agir en tant que mobilisateur. Je joue également un rôle de médiateur entre le conseil d’administration et la population en général pour conscientiser les gens au bénévolat créatif. Cela signifie que l’on peut s’impliquer auprès de la société tout en n’étant pas en contact avec la douleur et la misère. On veut démontrer qu’il est possible d’avoir du plaisir tout en faisant du bénévolat.

P.T. Nourrissez-vous d’autres ambitions en dehors du Québec? Pensez-vous par exemple à essayer éventuellement le marché français ou américain?

P.F. Le marché américain n’est pas dans mes plans mais la francophonie m’intéresse. Je suis très attaché à la langue française que j’aime. Je souhaite continuer ma carrière professionnelle dans cette langue. Mon prochain défi consistera à être visible en tant qu’animateur mais aussi en tant que producteur de contenu original sur le web.

P.T. En tant qu’animateur chevronné, quels conseils auriez-vous à donner aux jeunes souhaitant faire une carrière dans le domaine du divertissement?

P.F. Au cours des années, j’ai acquis diverses expériences et tout ce que nous faisons dans la vie nous sert. Par exemple, j’étais dans la marine canadienne ce qui m’a permis d’avoir une plus grande discipline, une qualité très importante dans le domaine du divertissement. Plus spécifiquement, dans la sphère médiatique, j’ai beaucoup appris de Jean-Paul Chartrand senior, animateur sportif. Je me suis toujours souvenu d’un conseil précieux qu’il m’a donné : « dans notre métier, il faut surtout à nos débuts choisir des thèmes que nous maîtrisons très bien ».
Le premier endroit où j’ai travaillé à Montréal, c’était à RDS parce que j’avais joué pendant quelques années au handball au Québec dans des ligues. Par conséquent, je connaissais davantage ce domaine qu’une grande partie de la population. Le handball n’étant pas une discipline très connue ici, j’étais donc bien placé pour apporter un éclairage intéressant à ce sujet à l’auditoire québécois lorsque je me retrouvais sur les ondes. Je faisais ainsi des reportages à la pige pour RDS sur les équipes de handball. Il est donc plus aisé de s’exprimer de cette façon en public. Au fil des années, on développe des réflexes, des façons de faire, des patterns, une force intérieure en d’autres mots une confiance. Tout cela permet d’être plus confortable à aborder des sujets que l’on connaît moins. La préparation de ses chroniques est évidemment très importante, il faut développer des techniques de recherche, etc.

Si l’on désire mener une carrière durable dans la francophonie, il importe d’avoir une qualité supérieure à la moyenne au niveau de la maîtrise de la langue dans le domaine du divertissement. On doit être à l’affût des réformes de la langue tout en la gardant jeune, authentique et précise. Il faut axer sa posture vers une qualité de langue française élevée. Il est possible d’avoir de très beaux échanges en français. Il s’agit d’une très belle langue apportant notamment beaucoup de nuances, de couleurs et de richesse. Pour performer dans le domaine du divertissement, il importe également d’être persévérant car il y a toujours de la place à l’amélioration. Les décisions professionnelles prises ne doivent pas être perçues de façon personnelle. Le fait de ne pas avoir été embauché pour un emploi ne doit pas remettre en cause les capacités intrinsèques de l’individu. Les raisons peuvent être de natures circonstancielles ou autres. Il ne faut pas se laisser atteindre. Ces expériences donnent l’opportunité de nous en servir à titre d’apprentissage à savoir qu’on peut s’informer par exemple auprès des décideurs de ce qui n’a pas fonctionné. De cette façon, cela nous permet de se construire dans le métier. A Radio-Canada, il existe ici des employés qui travaillent depuis plus de 25 ans et qui suivent des ateliers de perfectionnement au niveau de la communication, etc.

Ma philosophie de la vie consiste à dire que lorsqu’une porte se ferme, il y en a une plus grande qui nous attendra dans le futur. Il faut donc avoir une confiance très forte dans ce domaine et être toujours prêt à s’améliorer. On doit ainsi être flexible et souple. En d’autres mots, on ne peut se permettre de dormir sur ses lauriers et il importe de toujours chercher à redoubler d’efforts. Une excellente réputation professionnelle doit se mériter. Il faut se fixer des objectifs précis et aller jusqu’au bout.


P.T. Désirez-vous ajouter quelque chose avant de conclure?

P.F. Oui, je suis fier sans prétention d’une performance accomplie dans le cadre de ma carrière lorsque je me retrouvais sur les ondes d’Espace Musique de Radio-Canada. J’ai doublé les cotes d’écoute pour l’émission matinale « Réveil ». Il s’agit d’un aspect important à la radio d’obtenir des cotes d’écoute car cela représente un peu le nerf de la guerre. Tout dépend du nombre d’auditeurs qui nous écoutent. C’est d’ailleurs grâce à ma performance pour l’émission « Réveil » que j’ai été recruté à la première chaîne de Radio-Canada et cela a une valeur professionnelle. Il est fort plaisant que mon travail soit apprécié par l’auditoire et les décideurs de Radio-Canada. Je suis fier également d’avoir amené des jeunes auditeurs à la Société d’État. Cette tranche d’âge n’écoutait pas nécessairement avant Radio-Canada. Ceci représente pour moi une boucle. Je me considère comme un enfant de Radio-Canada qui avait des parents écoutant cette chaîne et ce, jusqu’à présent. J’ai reçu à l’époque la richesse de cette Société d’État et maintenant, j’ai l’impression de donner à cette chaîne mon bagage en amenant notamment des jeunes auditeurs. Pour moi, cela représente une belle histoire et j’en suis fier.

P.T. Vous êtes d’une certaine façon situé entre la plus jeune génération et la plus vieille.

P.F. Oui, tout à fait.

Merci monsieur Fehmiu pour avoir partagé avec nous votre remarquable parcours et expérience professionnelle!



Cursus académique et professionnel de Philippe Fehmiu:



Formation en Art et Technologie des Médias (au CÉGEP de Jonquière) (1988-1990)

Marine canadienne (1987-1990)

Annonceur de la météo chez radio Météomédia (1991)

Pigiste à RDS (1990)

VJ à Musique Plus (1993-1997)

Jasmine: acteur (1996)

Directeur du développement corporatif chez Zoum Interactivité (juillet 1999-décembre 2000)

Loft Story: animateur ( 2003)

Tu m’étonnes: reporter ( 2004)

Fréquence libre: animateur (Nov. 2008-jusqu’à présent)

Le Lab: animateur (2008)

Réveil avec Philippe Fehmiu: animateur (2007-2008)

Documentariste: Descendants d’esclaves ( 2006)

Technotronique: animateur ( 2000)

L’empire des sciences: animateur (2000)


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