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Le Mensonge peut courir un an, la vérité le rattrape en un jour, dit le sage Haoussa .

Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur.










Monday, May 11, 2009

La Democratie en Afrique


Mazide N'Diaye, Executive Secretary
Forum of African Voluntary Development Organizations
Dakar, Senegal

English

Le 11 février de 2000

Il est désolant de constater que le monde et les intellectuels africains refusent de regarder notre continent tel qu’il est et veut lui faire porter une camisole de force qui s’adapte au mode dominant de raisonnement .

L’Afrique n’est pas un pays et aucun des pays africains n’est un pays dans le sens ou les habitants souhaitent vivre ensemble et travaillent pour consolider cette vie commune.Les africains n’ont que très peu contribué à la définition de ce qui est aujourd’hui le pays de chacun d’eux. Ce sont des populations qui ont des langues et des cultures différentes qui ont guerroyé jusqu'à ce que les européens et les arabes, profitant de cette instabilité et disposant d’une avance technologique importante viennent s’approprier leurs territoires respectifs.La multitude de nations de faibles populations surtout dans la zone équatoriale se sont vue sous un même dominateur qui imposa les conditions de vie allant des travaux forcés à l’esclavage et la déportation.

Le travail forcé n’a cessé qu’en 1956 pour certains pays sous domination française et l’apartheid n’a cessé que depuis dix ans. Tout ceci a été perpétré contre nos peuples aussi longtemps que cela pouvait générer des richesses. La bonne gouvernance n’était pas à l’ordre du jour car entre civilisés on pouvait s’accorder un peu d’indulgence.

En fait il serait intéressant de rechercher dans l’histoire les critiques officielles (venant de gouvernement) que se faisaient les puissances colonialistes et les esclavagistes pour moraliser ou limiter les excès dans les pratiques inhumaines qui étaient imposées à nos peuples. On a tout lieu de croire qu’on ne pouvait être inhumain qu’avec des humains, or cette qualité ne nous était pas encore accordée jusqu'à tout récemment même si le racisme perdure.

Comment fonctionne la démocratie dans le monde ?

A New York c’est la crème des diplomates du monde qui se réunit toute l’année pour juger du déroulement du monde négocie et prend des mesures pour redresser les distorsions. Le Conseil de Sécurité prend entre les Assemblées Générales les mesures nécessaires au suivi des affaires. Là on a trouvé normal que les pays puissants qui sont à l’origine de toutes les injustices subies par nos pays aient le pouvoir de rejeter toutes nos propositions (en fait chacun d’eux peut le faire).

Donc quand les Vietnamiens étaient massacrés avec du napalm aucune résolution condamnant les tueurs ne pouvait passer. Il en a été ainsi pendant la guerre d’Algérie, actuellement le peuple Tchetchène subit un massacre effroyable mais il ne mérite pas que les équilibres stratégiques du moment ne soient dérangés. Pourtant la majorité des peuples du monde souhaite la fin de ce anéantissement. Que se serait-il passé si un petit pays s’était permis sans droit de veto de se comporter ainsi.

L’Iraq à sûrement la réponse. Dix ans après avoir occupé le Koweït pour quelques jours il continue de se faire affamer et bombarder, pas par les Nations Unies qui ne veut plus se laisser manipuler. Les Américains et les Britanniques s’en occupent et reviennent tranquillement continuer de siéger au conseil de sécurité qui ne peut les en exclure ni discuter de cette agression d’un pays en principe sous le contrôle des nations unies.

Il faut peut-être admettre que c’est la bonne gouvernance puisque ce sont les professeurs et inspecteurs de gouvernance qui le font. FOUTAISE la diplomatie est de plus en plus synonyme de carriérismes et parfois de lâches louvoiements devant les problèmes d’iniquité et d’injustice imposés par les puissants aux faibles. Comment le peuple Tchétchène peut-il comprendre la longue attente du monde devant son injuste extermination par les russes. Les diplomates occidentaux semblent plus incommodes ou gênés par le temps mis par les russes pour finir cette sale besogne. Cela maintient en effet la guerre ignoble de ce géant contre un minuscule pays dans les spots des médias et amène les peuples à se demander pourquoi leur gouvernement doit admettre ce qui est si immoral.

Comment dans un contexte international aussi peu moral ou seule la force fait loi, peut on parler de démocratie. Je voudrais que ceux qui se dépêchent toujours pour rabâcher les niaiseries du genre chaque peuple est responsable de la façon dont il est gouverné me disent en quoi le peuple Tchétchène serait responsable de ce qui lui arrive.

La guerre froide est bien finie vive le libéralisme, à mort les handicapés ?

C’est faux de dire que la démocratie en Afrique dépend des africains. La chute du mur de Berlin a fait plus pour la démocratie dans le monde que tous les sacrifices héroïques de tous ceux qui sont morts sous la torture, l’humiliation injuste et les chasses aux sorcières dans le monde.

Les protecteurs des fantoches et des tyrans sanguinaires ont alors trouvé inutilement coûteux de les soutenir, ils les ont lâchés et les changements ont commencé. Qui oserait aujourd’hui juger Mobutu ou Pinochet sans en même temps juger la CIA et les gouvernements belge d’alors. Quel gouvernement européen ou américain peut prétendre manquer d’information sur les exactions (massacres et détournements de fonds public..) de l’équipe de Mobutu de l’arrestation de Lumumba à l’arrivée de Kabila.

La bonne gouvernance n’était pas encore à l’ordre du jour il est de même pour l’Apartheid qui a durer plus de trente ans avant de déranger les multinationales qui ont finalement changé leur fusil d’épaule. La Démocratie c’est d’abord une entente entre partenaire sur des valeurs dont la justice, la moralité, l’équité, l’égalité, la liberté, l’indépendance sont au centre. Ce que nous vivons n’est qu’une domination des pauvres (individu ou pays). Cette domination est maquillée par l’absence de forces militaires d’occupation dont on a aujourdhui rarement besoin par que l’étouffement économique suffit généralement pour faire plier un dirigeant du pays pauvre ou lui faire comprendre que la raison du plus fort est toujours la meilleure.

La majorité des dirigeants africains ont compris le jeu et cela avant leur intelligentsia qui continue à exiger le respect des valeurs démocratiques. Eux s’ingénient à bien les maquiller et ils y réussissent généralement bien. Il ne leur est demandé que d’arranger les formes et c’est ce qu’ils font. Aujourdhui le plus important est le calme pour que les multinationales puissent tranquillement faire des bénéfices partout. Comment expliquer autrement que tous les militaires qui ont pris le pouvoir soient rapidement devenus des civils pour garder le pouvoir en Gambie, Guinée Bissao jusqu'à la chute de Nino Viéra, Guinée Conakry, Bourkina Faso, Niger de Maina Sara, Tchad, Togo, Ghana, Egypte, Libye, Mauritanie, Soudan, Madagascar. Il est pourtant clair que ce militaire n’a pas pu en quelques mois devenir mentalement un démocrate et que généralement il ne sera remplacé que par un autre coup.

D’autres arrivent au pouvoir suite à une lutte armée et se font élire : Liberia, Ethiopie, Ouganda, Mozambique, Angola, Zimbabwe. ils s’organisent pour bouleverser le cadre politique assez régulièrement pour qu’il ne soit possible à un adversaire crédible de les remplacer.

Enfin certains se sont fait transmettre le pouvoir par leurs prédécesseurs dont ils étaient le dauphin et tentent de conserver aussi longtemps que possible le pouvoir ainsi acquis. Sénégal, Côte d’Ivoire de Bédié, Cameroun, Gabon, Kenya, Tanzanie. On n’a jamais réussi à les remplacer par des élections parce que la loi électorale est chaque fois adaptée réaménagée pour leur faciliter la victoire.

Evidemment nous avons aujourd’hui une Afrique ou tous les chefs d’Etats à quelques exceptions près ont été élus mais nous savons qu’au lendemain de toutes ces élections l’opposition a dénoncé avec la dernière énergie les fraudes massives qui ont entachée la crédibilité des scrutins et pourtant ces élections ont partout été entérinées par les grandes puissances et les organisations internationales qui dans certains cas ont même contribué à apaiser l’opposition et dans d’autres cas à contribuer à la décourager en refusant de l’écouter ou en fermant les yeux sur les arrestations et crimes post électoraux .

Le Général De Gaulle disait que les Etats n’ont pas d’amis mais des intérêts, mais aujourd’hui l’intérêt semble passer au dessus de la morale et de l’équité. Le leadership des grandes puissances s’impose par la force et non par l’étique, par la pression médiatique et non par la droiture qui force le respect .La démocratie ne peut être forte dans le monde que si les principes et les règles qui la sous-tendent sont consensuels. Un système politique imposé par la force au reste du monde, même de manière subtile ne peut se prévaloir d’être démocratique.

Quelle Démocratie pour l’Afrique ?

Il est impossible d’étudier les démocraties Africaines sans les placer dans le contexte international qui interfère directement sur le jeux politique national dans nos pays. Il faut voir le dynamisme et l’activisme des diplomates occidentaux dans nos pays à l’approche d’élections pour s’en convaincre. L’importance accordée par nos dirigeants à l’opinion internationale c’est à dire celle des « pays amis » amis de l’état en place dont ils assurent pratiquement la survie financière, est plus essentielle que l’opinion publique nationale plus facile à étouffer ou à manipuler.

LA PRINCIPALE DIFFICULTÉ VIENT DE CE QUE NOUS SOMMES VRAIMENT. Une des difficultés majeures pour la démocratie africaine est le processus historique par lequel nous avons été mis ensemble, obligés de vivre ensemble et de constituer une Nation qui ne s’est pas choisi alors que nos véritables Nations sont appelées groupes ethniques. Ces Nations n’ont jusqu'à présent pas accepté de disparaître car ce sont des groupes qui ont des histoires de plusieurs millénaires et dont les règles de fonctionnements ont survécu à plusieurs défaites militaires et dominations adverses. Certaines de ces Nations connaissent des démembrements qui n’ont pas réussi à se fédérer ou se confédérer dans l’histoire parce que l’évolution a été déviée par la colonisation qui a profité de la multitude de petites nations avec les contradictions qui les opposaient afin de les diviser pour régner.

Pour donner un exemple un petit pays comme le Sénégal contient de nombreuses nations qui avant la colonisation avaient subi la domination-intégration de divers empires mais ont chaque fois préservé leurs entité nationale. Certains groupes nationaux se retrouvent actuellement répartis entre plusieurs états. D’autres quoique parlant la même langue appartiennent à des nationalités historiques différentes. C’est ainsi que les ouolofs qui constituent la majorité des sénégalais se répartissent entre diverses nationalités dont les frontières sont connues ainsi que leurs derniers souverains, le Baol, le Cayor, le Saloum, le Walo.

Les autres nationalités (les diolas, les toucouleurs, les mandingues, les malinkés les sérères...) ont aussi leurs particularités nationales qui les distinguent des autres au plan culturel, au plan physique et au plan orientation d’esprit. Ces différences encore vivaces nous avons essayé de les ignorer pour construire une nation sénégalaise qui jusqu'à présent tarde à se matérialiser . Je sais que le Sénégal existe au plan international ses frontières sont connues son drapeau etc. Mais là encore il faut bien reconnaître que dans une large mesure ces attributs de l’indépendance ont été créés pour satisfaire aux normes internationales et souvent dans la précipitation.

Les dirigeants africains sont obligés à chaque constitution de gouvernement d’intégrer la diversité ethnique (donc nationale) en son sein pour éviter les frustrations de certaines nationalités. Cela peut en effet entrainer des tension et de la défiance préjudiciable au fonctionnement des institutions ou à la paix intérieure. C est bien la preuve que nous sommes encore des pays en construction. C’est donc pour une nation comme celle là qu’il nous faut imaginer des principes de gouvernement juste tenant de l’opinion de la grande masse tout en préservant l’équilibre social entre les différents groupes qualifiés d’ethniques et qui sont de véritables nations.

Il nous faut admettre par ailleurs que les principes modernes de démocraties c’est à dire d’un pays de droit, sont loin d’être assimilés dans nos pays presque tous gouvernés par une minorité d’intellectuels utilisant une langue étrangère pour les communications officielles, les lois et les règlements, alors qu’en moyenne 70 % de nos populations sont analphabètes et ne comprennent pas la langue officielle. Il s’y ajoute que le langage du droit est compliqué et sophistiqué au point que la compréhension des textes juridiques n’est pas à la porté de personnes dont le niveau d’instruction n’est pas élevé.

Il ne fait donc aucun doute qu’un énorme travail d’éducation des populations s’avère nécessaire pour permettre leur adaptation aux règles modernes de gestion de la société. Ce travail est si énorme qu’il est difficile d’envisager les études qui seraient nécessaires pour une adaptation même transitoire de ses règles au niveau actuel de compréhension et d’intégration de nos populations au monde actuel. Car la définition d’une transition suppose une bonne connaissance de l’état des lieux et une connaissance de la destination.

Il se trouve qu’aujourd’hui les intellectuels africains et les leaders politiques sont partagés entre les racines du continent dont ils ne parviennent pas à se débarrasser et le monde moderne à l’intérieur duquel ils n’arrivent pas à s’adapter vraiment. parce que ne pouvant pas en général accepter certaines de ses conséquences trop antagoniques avec la culture africaine. En effet : l’égoïsme, l’individualisme, la recherche effrénée du profit, la banalisation des liens familiaux, la marginalisation des faibles etc. sont difficilement assimilables pour quelqu’un éduqué dans un esprit communautaire. De toute façon ce monde aussi ne semble pas vouloir nous accepter comme nous sommes.

Comment en effet, peut on avoir ses racines dans la société communautaire ce qui est le cas de tous les africains, devoir appliquer les normes internationales de droits fondées sur la culture occidentale urbanisée basée sur la liberté individuelle et faisant très peu de place aux formes de collectivités tenant aux liens historiques ou de sang et en même temps recevoir la caution de son peuple qui ignore presque tout de ces normes. L’Afrique est comme le pays Balkans mais sur une surface un million de fois plus grande et avec plusieurs milliers de nationalités qui cohabitent ensemble comme les nationalités de la Yougoslavie ont dû le faire depuis la première guerre mondiale c’est à dire contraints et forcés de se constituer en une nationalité multi-ethnique nous en avons vue les conséquences ces dernières années. La Yougoslavie a dû éclaté après de multiples tentatives d’épuration ethnique.

Les Africains doivent cesser d’avoir des complexes pour le simple fait d’avoir des guerres dites ethniques dont les causes ne sont pas étudiées et par conséquent dont les solutions ne sont pas trouvées. Les problèmes de la Bosnie de la Tchécoslovaquie, du Kurdistan et en Belgique la cohabitation entre wallons et flamands, comme l’intégration des Corses à la France ne sont pas réglés. Personne n’a su humainement régler ce problème à ce jour. Surtout pas les Etats Unies qui ont détruit les amérindiens et parqué les survivants dans des réserves ou l’alcool les consume lentement mais sûrement. C’est aussi le pays ou jusque dans les années soixantes on y lynchait les noirs et le KKK veille encore.

Ce n’est donc pas en cherchant à imiter les autres que nous trouverons notre voie. L’Inde malgré sa diversité ne semble pas non plus avoir réglé ce probléme. Le système démocratique qui aurait pu en Afrique fonctionner devrait commencer par :

1. admettre la multinationalité de chacun des cinquante deux pays africains, ce qui sous entend une décentralisation du pouvoir au niveau de chacun de ces nationalités pour permettre à chacun d’être dans une société politiquement géré en conformité avec la culture et l’éducation pour laquelle on a été préparé.

2. donner à chaque citoyen le sentiment d’être sécurisé sur son terroir parce que la délimitation en aura été acceptée consensuellement avec les voisins.

3. permettre à chaque groupe national d’établir ses règles de fonctionnement en exigeant seulement que celles-ci soient en conformité avec le respect de toutes les personnes, l’intégrité de leurs biens individuels, familiaux ou communautaires.

4. Les citoyens de chaque nation -qu’on cesser d’appeller groupe ethnique pour en minimiser les particularité et les droits à l’authenticité - doivent garder le pouvoir souverain de choisir leurs leaders et de définir leurs missions. Les modalités de choix de ces leaders devraient être consensuelles c’est à dire acceptables pour tous.

5. Les citoyens doivent aussi être dotés de moyens nécessaires pour contrôler les leaders et éventuellement les remplacer.

6. Une recomposition des fédérations ou confédérations mettant en cause presque toutes les frontières nationales actuelles en Afrique devrait être étudié, pour que dans les meilleurs délais les négociations puissent commencer et qu’on cesse de se voiler la face avec le rêve de l’unité africaine ou la volonté pragmatique de maintenir les frontières héritées de la colonisation dont souffrent tous nos peuples.

7. Mon problème n’est pas de savoir ce qui se passerait si à la fin du processus un millier de nations devenaient indépendantes ce qui va se passer pour leur admission aux nations unies avec les problèmes de logistique qui en découleront... Il appartient a l’ONU de régler ces problèmes et non à nous d’être ce que nous ne sommes pas pour arranger les autres.

Voilà selon moi les questions qui doivent être réglées pour que l’Afrique se mette sur une trajectoire démocratique qui prendra probablement du temps mais nous n’y échapperons pas par mimétisme ou par des fuites en avant ou par le mépris de ce que nous sommes avec nos limites et nos difficultés. Nous devons cesser de nous regarder avec les yeux des autres pour commencer à nous accepter nous mêmes et comprendre ce que nous ne sommes pas. J’ai voulu m’en tenir à ces prémisses qui me paraissent essentiels parce que je le crois les autres panelistes aborderont les questions techniques relatives à la séparation des pouvoirs, le processus électoral, le respect des droits de l’homme etc.

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