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Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur.










Tuesday, September 29, 2009

Docteur Dadis et Mister Camara


Les audiences dans le bureau de Dadis commencent à la tombée de la nuitLes audiences dans le bureau de Dadis commencent à la tombée de la nuit© DR

Après avoir revêtu les habits de sauveur du pays, à la mort de Lansana Conté, le chef de l’État glisse vers un régime autocratique et ubuesque : dérapages incontrôlés, improvisation permanente, autoritarisme... De quoi inquiéter, alors qu’il ne cache plus sa volonté d’être candidat à l’élection présidentielle de janvier 2010.

Alors que partout l’heure est à l’éloge de la « bonne gouvernance », Moussa Dadis Camara a inventé la « non-gouvernance ». Le leader du Conseil national pour la démocratie et le développement (CNDD, la junte qui s’est emparée du pouvoir en Guinée le 23 décembre 2008, au lendemain de la mort de Lansana Conté) est sans nul doute l’unique chef d’État au monde à ne pas avoir de cabinet en ordre de marche ni de secrétariat. Pas de fiche d’audience non plus pour les nombreux visiteurs attendant des heures pour un hypothétique entretien. Pis, le capitaine putschiste n’a participé qu’une seule fois à un Conseil des ministres, qu’il a quitté avant la fin de la séance. Après avoir erré pendant des mois à travers les allées du camp Alpha-Yaya-Diallo, les membres du cabinet présidentiel ont échoué dans une annexe du palais Sékhoutouréya, en centre-ville, à plusieurs kilomètres de l’enclave militaire où le patron s’est installé. La plupart d’entre eux ne le voient jamais. Et ils ne sont pas les seuls.

Le Premier ministre, Kabiné Komara, et ses collègues du gouvernement peuvent faire le pied de grue des jours entiers sans être reçus. Les horaires de « Dadis » y sont pour quelque chose. Persistance d’une habitude prise lors des premières heures du coup d’État, quand il fallait rester éveillé pour déjouer toute tentative de contre-putsch, le chef de la junte ouvre seulement à la nuit tombée les portes des deux petites pièces qui lui servent de bureau et de salle d’attente. Sa journée de travail débute au crépuscule.

Désordre au camp Alpha-Yaya-Diallo

Il n’a de tête-à-tête avec personne. Tout visiteur qui s’introduit dans son bureau y trouve un groupe de militaires ou des civils – parfois des anonymes sans fonction officielle – venus faire causette. Un joyeux désordre règne au camp Alpha-Yaya-Diallo. De sorte que les notions de secret et de discrétion ont totalement disparu du fonctionnement de l’État guinéen. Les moindres faits et gestes de « Dadis » alimentent en permanence la gazette et se retrouvent au cœur des conversations de salon à Conakry.

Le chef de la junte a choisi l’outing comme méthode de gouvernement. Toutes les questions, y compris les plus sensibles, sont réglées dans sa salle d’attente, sous l’œil des caméras de la Radiotélévision guinéenne (RTG). Il en résulte un feuilleton que les Guinéens ont baptisé, non sans humour et dérision, le « Dadis Show » – une sorte de quart d’heure du rire qui fait un carton dans les capitales de l’Afrique de l’Ouest où le journal de la RTG est suivi sur le câble. Les extraits diffusés sur Internet battent des records de fréquentation (30 000 visiteurs sur YouTube). Exercice de catharsis ponctué de colères, de coups de sang et de tirades moralisatrices, le « Dadis Show » permet à son acteur principal de se défouler sur les trafiquants de drogue présumés, les fonctionnaires suspectés de détournements, les diplomates ou hommes d’affaires établis dans son pays, mais également sur ses propres collaborateurs. Les révocations et les mises à la retraite anticipée sont prononcées devant les caméras. Mieux que la télé-réalité.

Premier ministre humilié

Si les faits n’étaient pas aussi graves et nocifs pour l’image de la Guinée, quelques morceaux choisis de ce feuilleton seraient à se tordre de rire. « Je ne suis pas votre égal », lance-t-il à Karl Prinz, ambassadeur d’Allemagne en Guinée, qui l’interpelle sur son éventuelle candidature à la présidentielle. « Si tu me parles comme ça, je te renvoie dans ton pays », sert-il comme amabilité à Anatoly Pantchenko, homme d’affaires ukrainien, ex-patron de la société minière Rusal Guinée.

Mais celui qui détient le record absolu des humiliations subies est sans nul doute son Premier ministre, 59 ans, débauché de la Banque africaine d’import-export (Afreximbank), basée au Caire. Le 9 septembre, alors qu’il anime une conférence de presse dans les locaux de la RTG, à Koloma, Dadis prend à partie à haute et intelligible voix Kabiné Komara, qui tente de lui chuchoter quelque chose à l’oreille : « Pourquoi tu me parles à l’oreille ? Pourquoi tu me déranges ? » Le pauvre Komara avait déjà subi un revers analogue quelques jours plus tôt. Las de végéter dans la salle d’attente du chef de l’État, il le rejoint dans le bureau du ministre de la Défense, Sékouba Konaté. Comme piqué au vif, Dadis s’emporte : « Pourquoi tu me suis ? Qui t’a dit d’entrer dans ce bureau ? Pourquoi tu es impatient ? » Ambiance. Une autre scène croustillante enregistrée circule désormais sur les téléphones portables. Hors de lui, Dadis lance au téléphone à un conseiller de Komara  : « Il est culotté de recevoir un directeur de zone aurifère sans nous tenir informés !… Ce n’est pas lui qui a pris le pouvoir ! Le Premier ministre, là, il est gonflé, il est gonflé, hein !… Il n’a pas affaire à un con. »

Mais la scène publique la plus grotesque est celle qui s’est déroulée le 8 juin 2009 dans une salle de conférences archicomble du Palais du peuple, siège de l’Assemblée nationale. Alors que le chef de la junte rencontre les fonctionnaires des administrations financières, il stoppe net le directeur des douanes, Mamady Touré, juste au moment où ce dernier réclame un statut particulier pour les douaniers. Et lui assène : « Monsieur Touré, vous êtes un démagogue. Vous pensez que ce sont les douaniers seulement qui n’ont pas de statut ? C’est moi qui vous ai nommé, et je vous suspends à partir de cet instant. »

Touré est parti comme il est venu. Il avait été catapulté à ce poste trois mois plus tôt, pour avoir été le premier à s’exécuter à la suite d’une supplique de Dadis lancée dans la cour de la Direction nationale des douanes : « Que celui qui s’estime capable d’être directeur lève la main ! » Mamady Touré aura eu, malgré tout, une plus grande longévité que Lamine Sidimé. Nommé le 9 juin, en pleine réunion publique au Palais du peuple, « président de la Commission d’orientation économique et politique », l’ex-président de la Cour suprême et ancien Premier ministre a été dégommé le surlendemain, après les nombreuses réactions dénonçant le retour aux affaires de ce symbole vivant des dérives du régime Conté.

Ces dérapages répétés ont fait de leur auteur, aux mimiques inimitables, un nouveau « guignol de la Toile » au français très approximatif. Les comportements de Dadis font certes sourire mais, surtout, ils intriguent et inquiètent. Ce capitaine petit et mince, agité et colérique, dépourvu de retenue et allergique au protocole, a les épaules trop étroites pour le costume de chef d’État. Ayant beaucoup de mal à se tenir en public, il peut, au beau milieu d’une rencontre officielle, griller une cigarette, se lever pour serrer la main à une personne dans l’assistance, applaudir à tout rompre, rire à tue-tête, interrompre le maître de cérémonie pour discuter ou pour distribuer la parole… Né dans une famille modeste à Nzérékoré, une contrée rurale reculée de la Guinée forestière qu’il n’a quittée qu’après son bac pour rejoindre Conakry, le soldat Dadis, qui n’a pas intégré les manières de la bonne société ni les codes du pouvoir, avoue lui-même n’avoir « pas connu l’opulence ». Mais, à 45 ans, ce militaire de carrière affiche un goût certain pour les montres et les lunettes de luxe.

Décisions à l’emporte-pièce

Dépourvu de tout contrôle sur ses faits et gestes, il tient le plus naturellement du monde des propos indignes de son rang actuel. « Je peux avoir une copine parce que je suis un homme, mais je ne détourne pas la femme d’autrui », lance-t-il, le 9 septembre, à des journalistes médusés. « Les hommes de la troupe peuvent en témoigner. Demandez-leur si je mens. Depuis la prise du pouvoir, je ne mets pas les pieds quelque part sans qu’ils le sachent », ajoute celui à qui la rumeur prête de nombreuses conquêtes féminines et un goût prononcé pour la bière et les alcools forts. Avant d’ajouter : « Je considère les veuves du général Lansana Conté comme des mères. Elles ne viennent pas au camp. » Allusion à peine voilée à une autre rumeur sur une liaison entre un ex-Premier ministre de Conté et l’une des épouses de ce dernier.

Improvisations, légèretés, décisions à l’emporte-pièce, nominations intempestives et coups de gueule, la méthode Dadis intègre également une bonne dose d’inconséquence. De quoi tuer le mythe du « capitaine sauveur de la nation » perceptible après son accession au pouvoir. Après l’avoir adulé, bon nombre de Guinéens le rejettent aujourd’hui et multiplient les actions de résistance face à ce qui s’apparente à une dictature rampante. Les jeunes de banlieue, qui ont troublé les dernières années du règne de Conté, se signalent par des manifestations de plus en plus fréquentes. En première ligne également, le Forum des « forces vives » de Guinée, bien décidé à empêcher sa candidature à l’élection présidentielle de janvier 2010. Dadis amuse, Dadis inquiète, mais la résistance s’organise. Son visage se tord, ses lèvres se tendent, ses yeux se plissent et sa voix s’aiguise, mais les colères de Dadis ne font plus peur.

Les magistrats sont les premiers à l’avoir bravé. Fin mai, ils déclenchent une grève pour réclamer la suppression du poste de secrétaire d’État chargé des Conflits, dont le titulaire, le lieutenant Issa Camara, se saisissait de litiges devant les tribunaux pour les trancher. Furieux, le chef de la junte les convoque et menace : « Au moment où nous nous battons pour que les Conakrykas aient accès à l’eau et à l’électricité, vous décidez de vous mettre en grève, comme si vous étiez supérieurs aux enseignants et aux médecins ! Tous les magistrats qui ne sont pas présents à cette rencontre sont radiés de la fonction publique. […] Monsieur le ministre de la Justice, prenez les noms de tous ceux qui sont absents ! Vous voulez paralyser l’administration ? Je vais vous paralyser moi aussi. Et si vous n’arrêtez pas, je vais vous mater. » Devant des juges impassibles, auxquels se joignent les avocats et les greffiers, le chef de la junte fait machine arrière. Le 5 juin, il annonce qu’il renonce à la mesure de radiation et, le lendemain, supprime, par décret, le secrétariat d’État chargé des Conflits. Non sans nommer Issa Camara « gouverneur de Mamou, chargé de la lutte contre les coupeurs de routes et les voleurs de bétail sur toute l’étendue du territoire » !

« Un soldat de bureau »

S’il clame haut et fort qu’il n’a peur de rien ni de personne, Dadis ne convainc guère. Son propos n’impressionne pas dans les rangs lorsqu’il assène au général Mamadouba « Toto » Camara, numéro deux du CNDD et ministre de la Sécurité : « Mon général, je vous interdis de me mettre en garde. Je n’ai pas peur des narcotrafiquants. Je n’ai pas peur de la mort. Le rouge, couleur de mon béret, est le symbole du sang. » L’ancien responsable des hydrocarbures de l’armée, recalé à l’entrée de l’Académie royale militaire de Meknès, n’a jamais connu la guerre et n’a jamais appartenu à une unité opérationnelle. À la différence par exemple de son ministre de la Défense, Sékouba Konaté, surnommé « le Tigre » pour sa férocité au combat (Sierra Leone, Liberia...) et qui arbore fièrement des blessures de guerre. Dadis est au contraire dépeint par ses frères d’armes comme un « soldat de bureau ». Il en prend ombrage et ne fait aucun mystère de son aversion, voire de sa jalousie, pour ceux qui ont gravi les échelons en faisant le coup de feu. « Chez l’officier, le grade compte moins que l’efficacité », confie-t-il à Jeune Afrique au lendemain de sa prise de pouvoir.

Quelques jours plus tard, le 28 décembre, il inaugure une vague d’arrestations – toujours en cours – d’officiers. L’ex-chef d’état-major, le général Diarra Camara, et vingt et un officiers généraux sont mis à la retraite d’office. Seize d’entre eux sont placés en détention au camp Alpha-Yaya-Diallo. Parmi eux figurent trois généraux : outre Diarra Camara, le vice-amiral N’Fali Daffé, l’ex-chef d’état-major de la marine, et son adjoint, le contre-amiral Fassiriman Traoré. Deux colonels, dont Vivas Sylla, proche de Lansana Conté, et trois commandants, dont Issiaga Camara, neveu du président défunt et ex-membre de la garde présidentielle, sont également mis aux arrêts.

Dans la nuit du 22 au 23 avril dernier, à la suite de l’annulation à la dernière minute de son voyage en Libye, Dadis ordonne l’arrestation du très charismatique Saa Alphonse Touré, commandant adjoint du régiment commando, d’Abdoulaye Keïta, instructeur au bataillon aéroporté, et d’autres soldats moins gradés. Sur le point de succomber aux tortures qu’il a subies, Saa Alphonse Touré a été transféré fin août à l’hôpital Donka avant d’être enlevé, sous les yeux de sa femme, par un commando qui l’a conduit vers une destination inconnue. Depuis, plus de nouvelles. Ainsi fonctionne le régime de Moussa Dadis Camara : les nombreux civils et militaires arrêtés sont gardés au secret, coupés de tout contact avec leurs proches et privés de l’assistance d’un avocat. Peu regardant sur les droits de l’homme, le nouvel homme fort de Guinée a remis au goût du jour l’incarcération par décret. Le 4 avril dernier, Amadou Mouctar Baldé, vice-président du comité d’audit, a été limogé par un acte signé du chef de l’État qui ordonnait en outre son emprisonnement pour détournement de deniers publics.

Le régime se durcit. Et plus encore depuis que Dadis a levé un coin du voile sur son intention de briguer la magistrature suprême en janvier 2010. Des SMS hostiles à sa candidature commencent à circuler sur les téléphones portables ? Les quatre opérateurs de téléphonie mobile opérant dans le pays sont illico presto sommés de bloquer leur système de messagerie. Les radios privées diffusent des émissions interactives dans lesquelles les Guinéens expriment leur désapprobation ? Une décision du Conseil national de la communication (CNC) tombe pour interdire « d’évoquer, jusqu’à nouvel ordre, des sujets politiques dans tout type d’émission interactive, et ce dans toutes les langues ». Les leaders de l’opposition, réunis au sein du Forum des forces vives, rappellent à Dadis son engagement à mener la transition et à transmettre le pouvoir à l’issue d’une élection à laquelle il n’est pas partie prenante ? Le chef de la junte ressuscite le comité d’audit créé aux premières heures du coup d’État. Dans son viseur, les candidats potentiels à la présidence qui furent des Premiers ministres de Conté : Sidya Touré, François Lonsény Fall, Cellou Dalein Diallo et Lansana Kouyaté. Celui qui déclarait urbi et orbi ne pas être assoiffé de pouvoir s’accroche aujourd’hui mordicus au fauteuil présidentiel.

Clanisme, ethnisme...

Il se barricade et range peu à peu dans les placards ses tirades sur l’ethnocentrisme pour s’entourer de membres de sa famille et de ressortissants de sa région. Après avoir confié dix ministères, le CNC, le Conseil économique et social et la Société des télécommunications de Guinée (Sotelgui, véritable pompe à fric) à des ressortissants de la Forêt (qui représentent à peine 9 % de la population guinéenne), il a choisi comme attaché de cabinet et chargé de mission son neveu, Siba Théodore Kourouma, et comme homme de main Papa Koly Kourouma, un autre membre de sa famille, qui joue le rôle d’intermédiaire financier. Celui qui, il y a peu, criait sa détestation de l’argent a dépensé 800 milliards de francs guinéens (110 millions d’euros) en neuf mois. La moitié de cette somme a été décaissée par la Banque centrale sous le justificatif « dépenses de souveraineté ».

Marabouts et féticheurs

Il est vrai que Dadis mène grand train. Les centaines de bœufs que son ami et ministre d’État Boubacar Barry fait égorger à longueur de journée en guise de sacrifice coûtent une fortune. Tout comme le traitement des marabouts et féticheurs recrutés aux quatre coins de l’Afrique de l’Ouest. Il supporte également à grands frais une demi-douzaine de partis (PNR, FDD, RDR…) créés pour soutenir sa candidature. Quiconque fonde un mouvement ou organise une manifestation de soutien est invité au camp, d’où il ressort les poches lestées. Moussa Dadis Camara multiplie bains de foule et meetings au stade du 28-Septembre. Il s’entoure de courtisans dont le démagogue Idrissa Chérif, leader du tout nouveau Rassemblement pour la défense de la République (RDR) et théoricien du… « dadisme ».

Le culte de la personnalité et l’ivresse du pouvoir se sont emparés du soldat Dadis. Il avait promis la rupture avec les dérives du passé. C’est l’équilibre de la Guinée qu’il risque de rompre.



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