Populistes et démagogues, l’un autant que l’autre, ils comptent en outre de très nombreux partisans dans leurs communautés respectives, aux yeux desquels ils font figure de héros et de « gardiens du ­temple ».

Mahmoud Ahmadinejad, président de l’Iran, « réélu » depuis près d’un mois (pour cinq ans !), et Avigdor Lieberman, ministre israélien des Affaires étrangères depuis trois mois – car c’est d’eux qu’il s’agit –, paraissent aux antipodes l’un de l’autre, mais, vous allez le voir, ils se ressemblent étrangement.

Je sais que la comparaison et le rapprochement que je vais faire entre eux étonneront certains, en choqueront d’autres. Mais j’espère montrer qu’ils desservent tous les deux – au même niveau – leur cause et leur camp, qu’ils sont dangereux pour la paix et qu’il faut les faire partir.

Chacun de leurs deux pays, la région où ils sévissent et le monde entier se porteront mieux lorsqu’ils auront été écartés du pouvoir.

1. Ils sont tous les deux de droite, voire d’extrême droite. Ce musulman et ce juif sont en réalité des… « évangéliques » à la Dick Cheney, des ultraconservateurs et des racistes déclarés.

Le premier rêve tout haut « d’effacer Israël de la carte », le second a recommandé, naguère, de bombarder le barrage d’Assouan pour faire disparaître l’Égypte sous les flots et a désormais pour obsession de détruire par le feu et préventivement la menace iranienne.

Tous deux s’expriment si vulgairement qu’on en arrive à éviter de les citer. Dans leurs discours, ils flattent les plus mauvais et les plus bas instincts de leurs communautés respectives.

Avigdor Lieberman se distingue, si je puis dire, de son compère : il est poursuivi, lui, par la justice de son pays, qui pourrait, dans les prochains mois, le forcer à démissionner.

2. L’un et l’autre font du tort à leur nation, embarrassent les autorités des pays qu’ils visitent, suscitent la polémique dès qu’ils voyagent et chaque fois qu’ils ouvrent la bouche.

On ne l’a pas assez relevé, mais les chefs des exécutifs français, britannique, allemand, canadien et américain, les principaux alliés et les meilleurs soutiens d’Israël, ont tous les cinq, à leur honneur, refusé de recevoir en personne Avigdor Lieberman, alors qu’ils ont régulièrement accueilli tous ses prédécesseurs.

Dans les grandes démocraties, seul Silvio Berlusconi, dont la réputation n’est pas excellente, a accepté de le recevoir : il a trouvé plus raciste que lui.

Dans les soixante ans de l’histoire d’Israël, c’est en tout cas la première fois que son ministre des Affaires étrangères n’est pas reçu par les plus hautes autorités dans les plus grandes démocraties.

Constatant ce boycott, le quotidien israélien ­Haaretz a écrit : « La triste réalité est qu’Israël n’a plus de ministre des Affaires étrangères en état de fonctionner normalement. La communauté internationale refuse de parler avec un politicien qu’elle juge raciste. »

Profitant de ses relations très amicales avec le Premier ministre Netanyahou et montrant ainsi qu’il est un vrai ami d’Israël, le président Sarkozy, c’est encore à son honneur, est allé beaucoup plus loin. Il a dit à Netanyahou en privé, mais devant témoins : « Débarrasse-toi de ce Lieberman, qui ressemble au Jean-Marie Le Pen de chez nous et dont les propos publics me font dresser les cheveux sur la tête.

Remplace-le par Tzipi Livni. Avec elle et Ehoud Barak, tu as une autre majorité avec laquelle tu pourras écrire un nouveau chapitre de l’histoire de ton pays. »

Ahmadinejad : qui a daigné le recevoir depuis qu’il a été mal réélu ?

– Le président russe Dmitri Medvedev (qui avait d’ailleurs reçu Lieberman comme l’a fait, dans son sillage, le Premier ministre Vladimir Poutine).

Tous les deux étaient bien contents de s’entretenir dans leur langue avec cet ancien compatriote, émigré en Israël…

– Mouammar Kaddafi, trop heureux d’utiliser le président iranien pour une énième provocation, l’a invité au sommet de l’Union africaine à Syrte. Ahmadinejad s’est annulé après s’être annoncé.

N’en doutez pas : ce « mal réélu » peinera à se faire recevoir en dehors du petit cercle de pays qui ferment les yeux sur les conditions de sa réélection, et chacun de ses voyages suscitera des réactions négatives.

Lieberman et Ahmadinejad ont donc un point commun de plus : dès lors qu’on se respecte et qu’on a une opinion publique à ménager, on répugne à leur serrer la main et à se laisser photographier avec eux.

On s’abstient donc de le faire, sauf si on y est absolument obligé par la fonction qu’on occupe.

En un mot comme en mille, ils sont infréquentables et cela rejaillit à la fois sur leur pays et sur la communauté dont ils se réclament, qu’ils pensent servir et, en fait, desservent.

Tant qu’ils garderont Mahmoud Ahmadinejad et Avigdor Lieberman comme leurs numéros deux, Ali Khamenei, Guide suprême de la République islamique d’Iran, et Benyamin Netanyahou, Premier ministre d’Israël, donneront une image brouillée de leur pays et enverront au reste du monde le mauvais signal :

ils nous signifient qu’ils n’ont pas opté pour l’entente et la coopération avec leurs voisins, qu’ils se sont mis, au contraire, dans une posture d’affrontement et une logique de guerre.

Leur peuple et le monde devront maintenir la pression jusqu’à ce qu’ils cèdent et se débarrassent de ces deux mauvais sujets. Ou soient eux-mêmes remplacés.

Conclusion : on peut affirmer, sans crainte de se tromper, que la crise de régime en Iran n’est pas terminée et que l’actuelle majorité au pouvoir en Israël n’est pas celle qui mènera le pays à la paix avec ses voisins et la région à la stabilité.