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Wednesday, September 07, 2011

Il y a vingt ans en URSS

L’épreuve de force décisive des 18-21 août 1991 
 
Par JEAN-MARIE CHAUVIER

Journaliste, Bruxelles.

Le coup de force des 18-21 août 1991 à Moscou, « tentative désespérée » de sauver l’URSS d’une dislocation inévitable, a précisément dégagé la voie à cette implosion et à la « thérapie de choc » ultralibérale des partisans de Boris Eltsine. Comment expliquer cet effet aussi « contre-productif » de l’aventure ? Une certaine vulgate occidentale nous présente les événements comme un western mettant aux prises une bande de méchants « communistes conservateurs » et les bons démocrates triomphant du Mal. Dès l’époque, les enjeux étaient pourtant clairs : la propriété et le pouvoir alors que la Russie avait déclaré sa souveraineté sur son territoire et ses richesses naturelles. Le « communisme » soviétique était déjà défunt et l’option en faveur du marché faisait consensus. Il restait aux divers groupes d’intérêt à « faire leur marché » dans un héritage soudainement livré à une grande braderie.

Quel contexte ? Quelles forces en présence ?

La perestroïka de M. Mikhaïl Gorbatchev est alors dans une impasse, avec une dégradation rapide de l’économie et des conditions sociales, une explosion des inégalités, des mouvements séparatistes et des conflits inter-ethniques à la périphérie. Tout le monde cherche une « sortie de secours ».
Une force nouvelle domine alors la scène politique : le pouvoir russe, son parlement et son président élu au suffrage universel, Boris Eltsine. Elle conteste le pouvoir fédéral incarné par M. Gorbatchev et n’en applique plus les lois ou projets de réformes. Elle dispose d’une large base sociale : des milieux d’affaires nouvellement créés, un mouvement ouvrier renaissant et, depuis peu, une nomenklatura économique d’Etat dégagée de l’ancien système d’économie administrée qui s’est effondré en 1989-1990.
L’équipe réformatrice russe, que mène le premier ministre Iegor Gaïdar, concocte une « thérapie de choc » comportant la libération des prix, de grandes privatisations, une réduction drastique des dépenses publiques conforme aux recommandations du Fonds monétaire international (FMI). Les libéraux russes viennent de prendre conseil auprès de Milton Friedman, l’un des papes du néolibéralisme, et des réformateurs du Chili d’Augusto Pinochet, où un séminaire fut organisé pour les Russes en avril 1991. Le modèle chilien fait alors figure d’exemple. Ses propagandistes n’excluent pas la nécessité, en Russie, d’un « pouvoir fort » pour appliquer les réformes. Cette « première force » est l’alliée temporaire des pouvoirs des autres républiques auxquelles M. Eltsine suggère de « prendre le plus possible de souveraineté ». L’indépendance des républiques baltes et sud-caucasiennes… et de la Russie est déjà une réalité. Ailleurs, on s’interroge sur les contenus éventuels de « l’indépendance » et de l’ « Union » ou « communauté » qui est censée succéder à l’URSS.
La deuxième force est celle du président soviétique Gorbatchev, initiateur de la perestroïka. Il bénéficie d’un préjugé favorable en Occident où l’on ne tarit plus d’éloges envers ce leader communiste qui a, au-delà de toute espérance, cédé tant de terrain dans les négociations sur le désarmement, la dislocation du bloc socialiste (Pacte de Varsovie) et la réunification allemande. Mais à l’intérieur, M. Gorbatchev a perdu tout appui. La population, qui avait placé tant d’espoirs en la perestroïka, supporte mal la « katastroïka » de son niveau de vie. La plupart de ses compagnons et conseillers, les intellectuels libéraux qui l’avaient porté de 1986 à 1989, ont rejoint le camp démocrate eltsinien.
M. Gorbatchev est seul. Il cherche depuis plusieurs mois un « nouveau souffle » à sa politique, qui consiste à franchir un à un tous les Rubicons (abolition du monopole du parti, feu vert aux privatisations, abandon des références communistes…), tout en maintenant un « choix socialiste » mal défini et une volonté de sauver l’Union sans trop savoir comment. Le président prend appui sur le referendum du 17 mars 1991, lors duquel 76 % des votants ont approuvé le maintien de l’Union « rénovée ». Mais les questions diversement formulées du referendum et les résultats de ce vote prêtent à discussion : s’agit-il d’une fédération rénovée, d’une confédération de « républiques souveraines » ou d’« Etats indépendants » ? Les idées que se font les citoyens soviétiques de « l’Union future », de même que des « indépendances », varient d’une république et d’une région à l’autre.
Surgit alors, au cœur de l’été 1991, la « troisième force ». Elle est attendue depuis des années, tantôt sous forme de revanche sociale ou « bunt (révolte) russe » dévastatrice, tantôt sous forme de coup d’Etat militaire. En fait, un groupe de dirigeants se constitue en Comité d’Etat pour l’état d’urgence. En l’occurrence, le vice-président de l’URSS Guennadi Ianaiev, le premier ministre Valentin Pavlov, les ministres de la défense Dmitri Iazov et de l’intérieur Boris Pougo, le chef du KGB Vladimir Kriouchtkov, le secrétaire du comité central du PCUS Oleg Baklanov. Ils passent à l’action en août.
Que veulent-ils ? Leurs déclarations évoquent la situation catastrophique du pays. Elles ne parlent aucunement du communisme à défendre et adhèrent aux réformes de marché, mais « dans l’ordre » et, manifestement, pas dans la ligne ultralibérale de Gaïdar. Leur objectif immédiat est d’empêcher la signature, prévue pour le 20 août, du nouveau Traité de l’Union concocté par Gorbatchev, que les putschistes maintiennent en résidence surveillée à Foros (Crimée). Eux aussi s’appuient, en l’interprétant à leur façon, sur le référendum de mars. Ils redoutent un traité qui abolirait de fait l’Etat central.
Les faits et gestes des putschistes sont étonnamment peu résolus. On se souvient de la conférence de presse convoquée pour se justifier : leurs visages sont blêmes, les mains de Ianaiev tremblantes. Ils ont cherché – en vain – à convaincre M. Gorbatchev de les couvrir, ils ont approché l’entourage de Boris Eltsine sans succès. Ils n’ont pas davantage obtenu la convocation d’un plénum du comité central du PCUS pour les soutenir. Les mouvements et retraits de troupes se font dans la confusion. Une partie d’entre elles se sont ralliées à Eltsine. Les démocrates ont mobilisé dans les rues des centaines de milliers de partisans, dont les employés des nouvelles firmes commerciales et les brokers de la bourse des matières premières qui ont confectionné l’immense drapeau tricolore russe qui figure dans tous les reportages filmés. Le troisième jour, le 21, le maréchal Iazov retire les troupes présentes à Moscou, la partie est perdue, Gorbatchev libéré.
Le 22 août, le ministre de la défense Boris Pougo et sa femme se suicident. Le 24, c’est le tour d’un autre partisan du putsch, le maréchal Serguei Akhromeïev. Arrêtés, accusés de trahison et emprisonnés, les putschistes seront amnistiés en janvier 1994. On connaît la suite des événements : les proclamations d’indépendance en cascade, la prise en mains des leviers de commande à Moscou par Boris Eltsine – M. Gorbatchev étant définitivement mis à l’écart – et finalement l’acte de décès de l’URSS prononcé le 8 décembre 1991.

Le rôle des communistes

Contrairement à l’idée reçue, les communistes orthodoxes n’adhèrent pas à la philosophie du putsch. Ils tentaient de défendre le socialisme et les droits des travailleurs contre les forces du marché, y compris la politique du gouvernement Pavlov. Mais la mise à l’écart de M. Gorbatchev leur convient.
Bien entendu, une majorité de l’appareil du parti soutint les putschistes et ce fut le prétexte, ensuite, à la dissolution du PCUS et à son interdiction dans plusieurs républiques. Cette réaction s’explique aisément : ces cadres politiques ou administratifs, à la différence des cadres économiques et des chefs d’entreprise séduits par la libéralisation, n’avaient que peu de chances d’embarquer dans le train du capitalisme en formation. Les affaires n’étaient pas leur spécialité. Il faut pourtant nuancer : une grande partie des cadres communistes, même les plus conservateurs, comme en Ukraine ou au Kazakhstan, ont suivi leurs dirigeants dans les séparatismes. Les indépendances contenaient la promesse de nouveaux fromages appétissants : gouvernements, administrations, ambassades etc. En Russie même, la bureaucratie d’Etat, du KGB, de l’armée s’est ralliée au nouveau pouvoir. Vladimir Poutine était dans le camp des « démocrates », au service de l’un des plus radicaux, Anatoli Sobtchak.

Les événements vus avec vingt ans de recul

Et si l’on évaluait les événements d’août 1991 et leurs enjeux avec le recul des vingt années écoulées ? Les craintes des putschistes se sont vérifiées : liquidation de l’URSS et politique de « réformes » ultralibérales, paupérisation de la majorité des populations, déchaînement de guerres civiles dans le Caucase, en Géorgie, au Tadjikistan.
Le programme des vainqueurs démocrates a été appliqué : libération des prix, le 2 janvier 1992 (confiscation de fait de décennies d’épargne populaire), privatisations en masse, réductions drastiques des dépenses publiques entraînant notamment l’effondrement du système de santé. En septembre-octobre 1993, les parlement et soviets initialement acquis à Eltsine puis rebelles à cette politique sont écrasés par la canonnade (au moins 150 morts à Moscou). Tel fut l’épilogue dramatique de l’épreuve d’août 1991.
La bataille « pour la propriété et le pouvoir » allait se révéler féroce et meurtrière. Une fois les putschistes d’août battus, la fraction moderniste de la nomenklatura, à la tête des entreprises d’Etat, allait disputer aux nouveaux milieux d’affaires (jeunes oligarques, circuits mafieux…) l’appropriation privée des moyens de production et d’échange. Le principal enjeu de cette bataille fut la maîtrise de la rente pétrolière. C’est sa captation qui fit bâtir des fortunes fabuleuses. Si le processus fut chaotique, il n’avait rien d’un « far west » spontané : la marche des privatisations fut étroitement dirigée par le nouveau pouvoir. Une oligarchie s’est installée. Après le krach financier de 1998, et sous l’impulsion du nouveau président Vladimir Poutine, la propriété fut partiellement redistribuée, le rôle de l’Etat restauré, et la reprise de la croissance permit l’émergence d’une classe moyenne aisée.
Il est douteux que les méthodes envisagées par le Comité d’Etat pour l’état d’urgence d’août 1991 – méthodes autoritaires et répression – aient pu empêcher la catastrophe qui a suivi. Les putschistes ne disposaient pas d’une base sociale importante et ne faisaient pas appel au peuple. Pas plus que M. Gorbatchev, qui s’appuyait sur une technocratie moderniste – celle-ci lui filait d’ailleurs entre les doigts. Eltsine et les autres dirigeants des républiques, communistes déjà « ex » ou nationalistes, disposaient, eux, d’une base sociale et de mobilisations populaires, alors que le soviétisme ne jouissait plus que d’une (immense) force d’inertie.
La réaction majoritaire semble avoir été l’attentisme. Même ceux qui tenaient au maintien de l’URSS ont rallié les pouvoirs en place ou se sont résignés lorsque l’emporta la dynamique de la dislocation. Par ailleurs, dans le désastre social et face à un capitalisme brutal qui modifia en profondeur les conditions d’existence, la plupart des gens optèrent pour la débrouille et les stratégies individuelles de survie. La crainte des violences, de la guerre civile, détermina la population à ne pas intervenir dans les conflits, qu’il s’agisse d’août 1991 ou de la crise de septembre-octobre 1993. De ce point de vue, on peut constater qu’en dépit de guerres périphériques très meurtrières (Nagorny Karabagh, Géorgie, Tadjikistan, Tchétchénie), la dislocation de l’URSS n’emprunta pas la voie yougoslave. Même si, par ailleurs, cette autre violence que furent « les réformes » entraîna le décès prématuré de millions de femmes, d’hommes et d’enfants qui s’avérèrent « inadaptés » au changement. Les militants du libéralisme russe ne se sont d’ailleurs pas gênés pour dire haut et fort, une fois lancées les réformes, « le prix à payer » par les Soviétiques pour avoir « vécu au dessus de leurs moyens » et pour résister encore à l’indispensable « modernisation » des institutions, des mœurs et des mentalités.
La « victoire démocrate » d’août 1991 répondait probablement aux aspirations des fractions modernistes ou indépendantistes de la société soviétique, ainsi qu’aux attentes de leurs alliés occidentaux.
On évitera pourtant de la confondre avec une victoire de la démocratie.


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