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E. do REGO

IL EXISTE MILLE MANIERES DE MENTIR, MAIS UNE SEULE DE DIRE LA VERITE.

Le Mensonge peut courir un an, la vérité le rattrape en un jour, dit le sage Haoussa .

Tant que les lions n’auront pas leurs propres historiens, les histoires de chasse continueront de glorifier le chasseur.










Thursday, June 23, 2011

Les rois du marathon, poumons du développement économique éthiopien


Kenenisa Bekele (au centre), avec Haile Gebreselassie (à droite) et Sileshi Sihine, le 17 août 2008 lors des JO.
ADDIS-ABEBA, ETHIOPIE - Le Monde.fr est allé à la découverte du miracle del'athlétisme éthiopien et vous propose, en quatre épisodes, de suivre la foulée des champions venus d'Abyssinie. Après un premier épisode sur la tradition du marathon, ce deuxième volet est consacré aux répercussions économiques de la machine à gagner éthiopienne.
Haile Gebreselassie sur une publicité pour la compagnie Ethiopian Airlines.
Haile Gebreselassie sur une publicité pour la compagnieEthiopian Airlines.H.B. / Le Monde.fr
Un salaire mensuel de 100 euros par habitant, une espérance de vie d'à peine 50 ans, une 169e place sur 177 pays à l'indicateur de développement humain de l'ONU... L'Ethiopie est bien l'une des nations les plus pauvres du monde. Mais après vingt années de guerres civiles (1974-1991), une famine meurtrière (1984), et un conflit avec l'Érythrée (1998-2000), le pays amorce depuis quelques années un redressement significatif.
La population ne cesse de croître (d'ici à 2050, elle devrait passer de 90 à 170 millions) et, en 2011, la croissance devrait s'élever à 10 %, la deuxième plus forte d'Afrique. L'industrie du bâtiment connaît par exemple un essor certain et Addis-Abbeba, la capitale, est saturée d'immeubles en construction ; les chauffeurs de taxi aiment à répéter qu'il y a cinq ans à peine, on ne voyait pas un seul échafaudage dans les rues. Les infrastructures font également peau neuve, avec le concours des Chinois qui, comme presque partout sur le continent africain, construisent des routes à tour de bras.
Et si de nombreux secteurs du tissu économique profitent de ce nouveau rythme, il en est un, traditionnel, qui s'est déjà affirmé comme un pilier de ce développement : l'athlétisme. Depuis les années 1960, l'Éthiopie domine cette discipline en course de fond grâce à des athlètes peu nombreux mais meilleurs que tous les autres. Haile Gebreselassie, Kenenisa Bekele ou encore Derartu Tulu ; tous sont multimédaillés, multirecordmen, mais aussi, et peut-être surtout, multimillionnaires.
"C'EST DE VOTRE BUSINESS DONT IL S'AGIT"
Car une médaille olympique, au-delà de l'exploit sportif qu'elle représente, c'est également un jackpot qui se traduit en prime de dizaines de milliers d'euros. Sans compter les contrats publicitaires – Haile fait par exemple la promotion d'une grande marque de whisky –, les meetings, les sponsors...
Aujourd'hui, Haile Gebreselassie est à la tête d'un empire estimé à environ 20 millions d'euros.
Aujourd'hui, Haile Gebreselassie est à la tête d'un empire estimé à environ 20 millions d'euros.H.B. / LeMonde.fr
Les entraîneurs de la fédération le savent bien. "C'est de votre business dont il s'agit", rabâche souvent Charles Yendork à ses athlètes. Sur la piste du stade miteux de la capitale, l'entraîneur du sprint capte l'attention de ses dissipés coureurs quand il leur parle gros sous. "Si vous avez un boulot classique en Éthiopie, vous gagnerez combien ? 1 000 birrs par mois, 3 000 maximum ? [entre 50 et 150 euros]. Alors que si vous gagnez une seule compétition d'athlétisme en Europe, vous pouvez remporter jusqu'à 3 000 ou 5 000 euros en une seule fois, ce que vous n'arriverez pas à gagner en un an !", insiste le technicien.
Certes, dans les villages, les gamins revêtent des maillots de foot trop larges et tapent dans des ballons. Mais si vous leur posez la question, ils vous diront que, plus grands, ils veulent être athlètes, "comme Haile". "Pour avoir une vie meilleure, subvenir aux besoins de ma famille", poursuit Yemane, un coureur de demi-fond de 19 ans qui a la chance d'avoir déjà été recruté par un centre de formation.
ATTENTION AUX RECRUTEURS VÉREUX
Alors, ils courent. S'ils sont bons, ils seront repérés par des sponsors, participeront à des concours et rejoindront peut-être l'équipe nationale. Mais gare à l'appât du gain. "Je dis toujours à mes athlètes de faire attention avant de s'engager", reprend M. Yendork. "Des agents étrangers viennent les voir pour leur faire signer des contrats. Or la plupart des sportifs ne parlent ni ne lisent l'anglais. Alors, il arrive qu'ils se fassent avoir ou qu'ils trahissent leur contrat sans le vouloir car ils ne comprennent pas toutes les clauses et il se retrouvent sans être payés du tout !"D'ailleurs, si la fédération est si méfiante envers les journalistes et si elle pinaille tant sur les autorisations de reportages, c'est, nous dira-t-on, pour protéger les coureurs d'éventuels investisseurs véreux.
Désormais, les athlètes veulent faire fructifier cet argent, passer dans le monde des affaires. "Je vois là l'hôtel d'Haile (Gebreselassie) avec son nom dessus", dit encore le coach Yendork à ses coureurs en pointant du doigt un immeuble derrière les gradins. "Je veux que, un jour, vous puissiez me montrer votre hôtel à vous !"Né dans une famille de douze enfants dans la province pauvre d'Arsi (200 km au sud d'Addis), celui qui courait pieds nus sur les sentiers de terre est devenu un prince. Aujourd'hui, s'il continue de courir (il a remporté un 10 000 m à Manchester le 15 mai), Haile Gebreselassie, 38 ans, est le premier à s'être aussi imposé comme un entrepreneur.
HAILE : "JE VEUX CHANGER LA VIE DU PEUPLE ÉTHIOPIEN"
L'homme, dont l'empire est estimé à 20 millions d'euros, possède des concessions automobiles et deux immeubles de bureaux à Addis, dans lesquels on trouve un comptoir d'Ethiopian Airlines, une filiale du service postal UPS, un café, une salle de gym et une entreprise de bâtiment. Avec cette dernière, Haile a fait construire deux écoles, un autre immeuble de bureaux, un théâtre et un hôtel de luxe à une centaine de kilomètres au sud de la capitale. "J'investis beaucoup dans mon pays et je continuerai à le faire tant que je continuerai à gagner de l'argent", disait le champion dans un entretien accordé à CNN fin 2007.
"Je veux changer la vie de ma famille et la vie du peuple éthiopien. Je ne veux pas être égoïste avec mon argent. Je veux donner du travail aux autres, je veux faire ma part du boulot !", expliquait-il alors. Plutôt que donner à des œuvres de charité, le champion a préféré investir dans le pays et, aujourd'hui, entre 750 et 1 000 Ethiopiens travaillent directement pour lui.
Depuis, d'autres athlètes lui ont emboîté le pas. Kenenisa Bekele, double champion olympique 5 000 et 10 000 m en 2008, possède un hôtel quatre étoiles à Addis, des immeubles de bureaux et devrait bientôt financer un complexe sportif près de la capitale. Plus modestement, la championne olympique du 10 000 m (2000) Derartu Tulu a investi dans un hôtel à Assela. Selon des chiffres de 2009, les athlètes éthiopiens injecteraient plus de 10 millions d'euros par an dans le pays, incités par l'Etat, qui leur octroie d'importantes facilités, notamment des baisses fiscales.
Les champions Haile Gebreselassie et Derartu Tulu possèdent chacun un hôtel.
Les champions Haile Gebreselassie et Derartu Tulu possèdent chacun un hôtel.H.B. / Le Monde.fr
DONNER UNE NOUVELLE IMAGE AU PAYS
Le succès de ces champions contribue à redorer la réputation de cette nation autrefois si glorieuse. La famine, la guerre et la sécheresse sont des stigmates qui collent encore à la peau du pays. Alors, quand le visage d'Haile s'affiche sur des campagnes de publicité internationales, c'est une figure de vainqueur que montre l'Ethiopie. "Nous avons un problème d'image publique, expliquait, en 2010, l'ambassadeur du pays auprès des Nations unies. Les médias ne parlent de nous que pour citer nos problèmes, or nous sommes aujourd'hui un des leaders d'Afrique. Avec Haile, nous voulons reconstruire l'image de l'Ethiopie."
"Haile a montré la voie aux autres", confirme Abel Seyoum, patron de l'agence de voyage Buska Tours à Addis. Comme beaucoup d'Ethiopiens, il approuve le passage aux affaires du champion : "Il a montré quoi faire avec tout cet argent, comment le transformer au bénéfice du pays. Et nous lui en sommes reconnaissants."

Hélène Bekmezian et Imanol Corcostegui

Tuesday, June 21, 2011

Israelis Rush for Second Passports | Opinion Maker

Israelis Rush for Second Passports

Posted on 04. Jun, 2011 by Franklin Lamb in Palestine
"Perhaps as many as half of the Jews living in Israel will consider leaving Palestine in the next few years if political and social trends continue."
By FRANKLIN LAMB
Beirut
Perhaps historians or cultural anthropologists surveying the course of human events can identify for us a land, in addition to Palestine, where such a large percentage of a recently arrived colonial population prepared to exercise their right to depart, while many more, with actual millennial roots but victims of ethnic cleansing, prepared to exercise their right of Return.
One of the many ironies inherent in the 19th century Zionist colonial enterprise in Palestine is the fact that this increasingly fraying project was billed for most of the 20th century as a haven in the Middle East for “returning” persecuted European Jews. But today, in the 21st century, it is Europe that is increasingly being viewed by a large number of the illegal occupiers of Palestinian land as the much desired haven for returning Middle Eastern Jews.
To paraphrase Jewish journalist Gideon Levy “If our forefathers dreamt of an Israeli passport to escape from Europe, there are many among us who are now dreaming of a second passport to escape to Europe.
Several studies in Israel and one conducted by AIPAC and another by the Jewish National Fund in Germany show that perhaps as many as half of the Jews living in Israel will consider leaving Palestine in the next few years if current political and social trends continue. A 2008 survey by the Jerusalem-based Menachem Begin Heritage Center found that 59% of Israelis had approached or intended to approach a foreign embassy to inquire about or apply for citizenship and a passport. Today it is estimated that the figure is approaching 70%.
The number of Israelis thinking of leaving Palestine is climbing rapidly according to researchers at Bar-Ilan University who conducted a study published recently in Eretz Acheret, (“A Different Place”) an Israeli NGO that claims to promote cultural dialogue. What the Bar-Ilan study found is that more than 100,000 Israelis already hold a German passport, and this figure increases by more than 7,000 every year along an accelerating trajectory. According to German officials, more than 70,000 such passports have been granted since 2000.
In addition to Germany, there are more than one million Israelis with other foreign passports at the ready in case life in Israel deteriorates. One of the most appealing countries for Israelis contemplating emigration, as well as perhaps the most welcoming, is the United States. Currently more than 500,000 Israelis hold US passports with close to a quarter million pending applications.
During the recent meetings in Washington DC between Israeli Prime Minister Netanyahu’s delegation and Israel’s US agents, assurances were reportedly given by AIPAC officials that if and when it becomes necessary, the US government will expeditiously issue American passports to any and all Israeli Jews seeking them.
Israeli Arabs need not apply.
AIPAC also represented to their Israeli interrogators that the US Congress could be trusted to approve funding for arriving Israeli Jews “to be allocated substantial cash resettlement grants to ease transition into their new country.”
Apart from the Israeli Jews who may be thinking of getting an “insurance passport” for a Diaspora land, there is a similar percentage of Jews worldwide who aren't going to make aliyah. According to Jonathan Rynhold, a Bar Ilan professor specializing on U.S.-Israel relations, Jews may be safer in Teheran than Ashkelon these days—until Israel or the USA starts bombing Iran.
Interviews with some of those who either helped conduct the above noted studies or have knowledge of them, identify several factors that explain the Israeli rush for foreign passports, some rather surprising, given the ultra-nationalist Israeli culture.
The common denominator is unease and anxiety, both personal and national, with the second passport considered a kind of insurance policy “for the rainy days visible on the horizon,” as one researcher from Eretz Acheret explained.
Other factors include:
The fact that two or three generations in Israel has not proven enough to implant roots where few if any existed before. For this reason Israel has produced a significant percentage of “re-immigration” — a return of immigrants or their descendants to their country of origin which Zionist propaganda to the contrary notwithstanding, is not Palestine.
Fear that religious fanatics from among the more than 600,000 settlers in the West Bank will create civil war and essentially annex pre-1967 Israel and turn Israel more toward an ultra-fascist state.
Centripetal pressures within Israeli society, especially among Russian immigrants who overwhelmingly reject Zionism. Since the fall of the Berlin Wall in 1989, some one million Jews have come to Israel from the former Soviet Union, enlarging the country's population by 25 percent and forming the largest concentration in the world of Russian Jews.But today, Russian Jews comprise the largest group emigrating from Israel and they have been returning in droves for reasons ranging from opposition to Zionism, discrimination, and broken promises regarding employment and “the good life” in Israel.
Approximately 200,000 or 22% of Russians coming to Israel since 1990 have so far returned to their country. According to Rabbi Berel Larzar, who has been Russia’s chief Rabbi since 2000, "It's absolutely extraordinary how many people are returning. When Jews left, there was no community, no Jewish life. People felt that being Jewish was an historical mistake that happened to their family. Now, they know they can live in Russia as part of a community and they don’t need Israel."
No faith in or respect for Israeli leaders, most of whom are considered corrupt.
Feelings of anxiety and guilt that Zionism has hijacked Judaism and that traditional Jewish values are being corrupted.
The increasing difficulty of providing coherent answers to one’s children, as they become more educated and aware of their family history, and indeed honesty to oneself, on the question of why families from Europe and elsewhere are living on land and in homes stolen from others who obviously are local and did not come from some other place around the World.
The recent growing appreciation, for many Israelis, significantly abetted by the Internet and the continuing Palestinian resistance, of the compelling and challenging Palestinians' narrative that totally undermines the Zionist clarion of the last century of “A Land without a People for a People without a Land.'
Fear mongering of the political leaders designed to keep citizens supporting the government’s policies ranging from the Iranian bomb, the countless ‘Terrorists” seemingly everywhere and planning another Holocaust, or various existential threats that keep families on edge and concluding that they don’t want to raise their children under such conditions.
Explaining that he was speaking as a private citizen and not as a member of Democrats Abroad Israel, New York native Hillel Schenker suggested that Jews who come to Israel "want to make sure that they have the possibility of an alternative to return whence they came." He added that the "insecurities involved in modern life, and an Israel not yet living at peace with any of its neighbors, have also produced a phenomenon of many Israelis seeking a European passport, based on their family roots, just in case."
Gene Schulman, a Senior American-Jewish fellow at the Switzerland-based Overseas American Academy, put it even more drastically, emphasizing that all Jews are "scared to death of what is probably going to become of Israel even if the U.S. continues its support for it."
Many observers of Israeli society agree that a major, if unexpected recent impetus for Jews to leave Palestine has been the past three months of the Arab Awakening that overturned Israel’s key pillars of regional support.
According to Layal, a Palestinian student from Shatila Camp, who is preparing for the June 5th “Naksa” march to the Blueline in South Lebanon: “What the Zionist occupiers of Palestine saw from Tahir Square in Cairo to Maroun al Ras in South Lebanon has convinced many Israelis that the Arab and Palestinian resistance, while still in its nascence, will develop into a massive and largely peaceful ground swell, such that no amount of weapons or apartheid administration can insure a Zionist future in Palestine. They are right to seek alternative places to raise their families.”
Wikio

Comment être Français au XXIe siècle ?




Chems Eddine CHITOUR


« L’identité n’est pas donnée une fois pour toutes, elle se construit et se transforme tout au long de l’existence. »
Amin Maalouf (Les Identités meurtrières)
« Il ne faut pas se payer de mots ! C’est très bien qu’il y ait des Français jaunes, des Français noirs, des Français bruns. Ils montrent que la France est ouverte à toutes les races et qu’elle a une vocation universelle. Mais à condition qu’ils restent une petite minorité. Sinon, la France ne serait plus la France. Nous sommes quand même avant tout un peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne. Qu’on ne nous raconte pas d’histoires ! Les musulmans, vous êtes allés les voir ? Vous les avez regardés, avec leurs turbans ou leurs djellabas ? Vous voyez bien que ce ne sont pas des Français ! (...) Essayez d’intégrer de l’huile et du vinaigre. Agitez la bouteille. Au bout d’un moment, ils se sépareront de nouveau. Les Arabes sont des Arabes, les Français sont des Français. Vous croyez que le corps français peut absorber dix millions de musulmans, qui demain seront vingt millions et après-demain quarante ? Si nous faisions l’intégration, si tous les Arabes et Berbères d’Algérie étaient considérés comme Français, comment les empêcherait-on de venir s’installer en métropole, alors que le niveau de vie y est tellement plus élevé ? Mon village ne s’appellerait plus Colombey-les-Deux-Églises, mais Colombey-les-Deux-Mosquées ! »
Ces mots du général de Gaulle il y a un demi siècle dans la tourmente des "évènements d’Algérie" résument à eux seuls toute la problématique de la condition « d’être français » tel que le pensait De Gaulle en plein XXe siècle. Qu’en est-il aujourd’hui de l’identité française au XXIe siècle ? Doit-on la circonscrire uniquement aux Gaulois à têtes rondes pour paraphraser San Antonio dans « l’Histoire de France » ? Doit-on au contraire faire du désir d’être ensemble le ciment d’une identité du XXIe siècle ? (1)
Tout est reparti d’un débat organisé par le ministre de l’Identité nationale. Le président Sarkozy -pour des raisons éminemment « électoralistes » - a pris le risque - calculé ? - de réveiller les vieux démons de l’extrême droite et d’ouvrir la boite de Pandore qu’il sera difficile de refermer. D’autant que la tribune publiée dans le journal Le Monde, le 9 décembre, suscite des interrogations. On se souvient que le thème de l’identité a déjà été « vendu » lors des élections de 2007. Cela a commencé par une petite phrase : « La France : aimez-la ou quittez-la ». Ce mot a été emprunté à Ronald Reagan « America love it or leave it ». A l’époque, Le Figaro magazine se demandait : « Serons-nous encore français dans trente ans ? ».
Dans la mythologie grecque, écrit un intellectuel sous le pseudonyme d’Evariste, Pandore fut créée par Zeus pour se venger des hommes. Elle amena avec elle une jarre, qui renfermait tous les maux de l’humanité, dont la Vieillesse, la Maladie, la Guerre, la Famine, la Misère, la Folie, le Vice, la Tromperie et la Passion, ainsi que l’Espérance. Poussée par la curiosité, Pandore finit par ouvrir sa boîte, libérant ainsi tous ces maux. Nicolas Sarkozy, lui, en a fait un programme politique. Pure Folie, car Nicolas Sarkozy a demandé à Éric Besson de lancer ce débat à travers toute la France pour reconquérir l’électorat d’extrême-droite. (...) L’identité nationale renvoie à l’imaginaire que chacun projette, à partir de son histoire singulière et de son ressenti particulier, sur la France. C’est la raison pour laquelle un tel sujet de débat ne peut qu’alimenter les Passions et les divisions. Il ne peut conduire qu’à la discorde. On relèvera cet autre passage [ du discours du président Sarkozy], qui ne peut qu’introduire la confusion dans les esprits : « Mais je veux leur dire aussi [aux musulmans, Ndlr] que, dans notre pays, où la civilisation chrétienne a laissé une trace profonde, où les valeurs de la République sont partie intégrante de notre identité nationale, tout ce qui pourrait apparaître comme un défi lancé à cet héritage et à ces valeurs condamnerait à l’échec l’instauration si nécessaire d’un islam de France [...] »
« Les musulmans doivent-ils comprendre, explique Evariste, que « la France, tu l’aimes chrétienne ou tu la quittes » ? (...) Ce serait oublier que la République s’est construite en rupture avec la France chrétienne, (...) qu’il aura fallu qu’un sang impur abreuve nos sillons (que le sang bleu des forces monarchistes et cléricales soit versé) ». (2)
On comprend que dans ce débat, à tort ou à raison les Français musulmans égaux en droits voient dans ce débat sur l’identité une tentative d’exclusion - séparer le bon grain "de souche" de l’ivraie " l’allogène- alors qu’il est censé inclure . La réprobation du recteur de la mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, est révélatrice à ce titre du ressentiment qui monte, reprochant au président d’une France plurielle de considérer l’Islam comme une « foi d’immigrés », et d’exhorter à « l’invisibilité » des musulmans dans l’espace public « Un déversoir et un défouloir ! » La coupe est pleine pour le commissaire à la diversité et l’égalité des chances, Yazid Sabeg, qui a confié au Journal du Dimanche ses mauvais pressentiments : « Ce débat échappe à tout contrôle, il peut aggraver les fractures et donne à beaucoup de Français, les Français de confession musulmane, le sentiment d’être une fois de plus marginalisés. »
Qui est en fait Français et depuis quand ? En son temps, le général de Gaulle aurait répondu : « Pour moi, l’histoire de France commence avec Clovis, choisi comme roi de France par la tribu des Francs, qui donnèrent leur nom à la France. Avant Clovis nous avons la préhistoire gallo-romaine et gauloise. L’élément décisif pour moi c’est que Clovis fut le premier roi à être baptisé chrétien. Mon pays est un pays chrétien et je commence à compter l’histoire de France à partir de l’accession d’un roi chrétien qui porte le nom des Francs. » Ces quelques phrases résument parfaitement ce que le XIXe siècle catholique n’a cessé de proclamer sur tous les tons et en toutes circonstances : la France n’est pas un peuple comme les autres ; le peuple élu, prédestiné des temps modernes (par opposition à l’ère biblique), le successeur insigne du peuple hébreu. (3)
Il y a donc à l’évidence débat sur les origines, ce qui nous appelle à parler de Français de souche. La contribution suivante nous permet den cerner les contours. : « (...) Les propos tenus par les personnalités politiques, indiquent clairement que l’identité française est nécessairement une identité française de souche. Donc, plutôt que de perdre son temps à se demander, à l’instar du gouvernement Sarkozy, « Pour vous qu’est-ce qu’être français », demandons-nous plutôt « qu’est-ce qu’être français de souche ? » Si pour le dictionnaire est de souche celui « qui appartient à un groupe national donné depuis de nombreuses générations, au point de ne plus être considéré comme un immigrant ni un descendant d’immigrant », pour nous, en observant la réalité des faits, la chose est claire : est de souche celui qui est « blanc » et qui porte un nom, un prénom, à consonance européenne, pour ne pas dire chrétienne. Au XVIe siècle l’Europe, via le Portugal et l’Espagne, promulgue des lois de « limpieza de sangre » (« purification du sang ») contre ses propres populations juives et musulmanes. A la suite de la chute de Grenade (1492) ».
« (...) En 1609, il y a exactement quatre cents ans, l’Inquisition décide d’en finir définitivement avec les Morisques. Les autorités politiques et cléricales hésitent un moment entre l’extermination physique et la déportation. Ce sera en fin de compte la déportation : « 500.000 personnes - hommes, femmes et enfants, seront déportées (hors d’Europe) avec, au moins, 75% de "pertes" ». Avec cette histoire tragique, l’Europe -et la France par conséquent -s’est bâtie une identité amputée de ses Juifs et de ses Musulmans... Le XIXe siècle européen érige les Blancs en dieux. En France, comme ailleurs en Europe, la tendance est la même. (4)
En 1882, Renan pouvait définir la nation comme « une âme, un principe spirituel ». Comment peut-on définir l’identité ?. Quelles sont les valeurs qui sont qu’on peut se sentir français en dehors des injonctions et qui peuvent changer d’un pouvoir à l’autre ? Montesquieu en son temps expliquait aux Français « comment être persan ? » Quelle différence y a-t-il entre un Bulgare un Hongrois un Arménien, un Espagnol, un Italien au regard de l’intégration avec un Algérien ou un Marocain ? La différence réside d’abord dans la non-maîtrise par les premiers de la langue et de la culture françaises. En fait, il n’est pas important qu’ils connaissent la « Ballade des pendus » de François Villon. Par contre, leur avantage décisif est l’identité religieuse qui, a bien des égards, berce d’une façon invisible la société française.
On le devine ; Tout ce beau monde est "compatible" avec le corps social français pétri par deux mille ans de cultures chrétiennes combien même ces ci-devant candidats à la nationalité n’ont qu’un rapport lointain avec la religion chrétienne, n’empêche ils sont « comme nous », traduction : ils peuvent être français, Certains français de fraîche date poussent le ridicule jusqu’à se « croire plus royalistes que le roi » N’a-t-on pas vu Manuel Val - avec des ascendants espagnols - émettre le souhait qu’il y ait plus blancos dans sa circonscription ?. Par contre, on peut être français depuis un siècle, le nom patronymique et surtout l’appartenance à une sphère cultuelle sont des « marqueurs indélébiles ».
On se souvient de l’article pathétique de Mustapha Kessous, journaliste au Monde, où il décrit le racisme ordinaire. On se souvient aussi de ces beur(e)s qui, las d’attendre un hypothétique ascenseur social, en viennent à revendiquer leur paléo-racine en reprenant les noms de Mohamed au lieu de Jean-Pierre de Rachida au lieu de Caroline. Sur quelle vision de l’histoire doit alors reposer l’identité nationale ? Celle d’une France gauloise, continuée par les rois, accomplie définitivement avec la République ? Ou celle d’une France métissée, faite de diversités culturelles et ethniques, ouverte sur l’avenir ?
Qu’est-ce qu’être français au XXIe siècle cinquante ans après le jugement sans appel du général ? Doit-on comme le réduit le débat actuel, à tenir à distance le musulman au point qu’à la 4e génération on parle encore de l’origine des beurs ? Nous donnons la parole à Jean Baubérot qui répond magistralement et avec humour au président Sarkozy :
« Tu as écrit une tribune dans Le Monde (9 décembre) qui a retenu toute mon attention. En effet, tu t’adresses à tes « compatriotes musulmans », et c’est mon cas, moi Mouloud Baubérot, frère siamois de celui qui tient ce blog. Avant, par politesse, il faut que je me présente très brièvement. Ma famille provient de Constantine, ville française depuis 1834 et chef-lieu d’un département français depuis 1848. Nous sommes donc d’anciens Français. D’autres nous ont rejoints peu de temps après et sont devenus Français, en 1860, tel les Niçois et les Savoyards. Et au siècle suivant, d’autres sont encore venus. Certains de l’Europe centrale, bien différente de notre civilisation méditerranéenne. Mais, comme tu l’écris très bien, nous sommes très « accueillants », nous autres. Alors nous avons donc accueilli parmi eux, un certain Paul Sarkozy de Nagy-Bosca, qui fuyait l’avancée de l’Armée rouge en 1944. Nous sommes tellement « accueillants » que nous avons fait de son fils, ton frère siamois, immigré de la seconde génération, un Président de notre belle République. Comment être plus accueillants ? Mais faudrait quand même pas tout confondre : entre lui et moi vois-tu, c’est moi qui accueille, et lui qui est accueilli. Ne l’oublie pas. (...) Quand les Sarkozy sont devenus Français, le ciel de Paris s’ornait d’une Grande Mosquée, avec un beau minaret. Je suis d’accord, moi Mouloud qui t’accueille, je dois te faire « l’offre de partager (mon) héritage, (mon) histoire (ma) civilisation), (mon) art de vivre ». Tiens, je t’invite volontiers à venir manger un couscous avec moi. (...) » (5)
« Contrairement à moi, puisque tu n’es en France que depuis une seule génération, tu as encore beaucoup de choses à apprendre quant aux « valeurs de la République (qui) sont partie intégrante de notre identité nationale ». Vu ta fonction, il faut que tu l’apprennes vite car « tout ce qui pourrait apparaître comme un défi lancé à cet héritage et à ses valeurs condamnerait à l’échec. » Mais, je ne suis pas inquiet : tu es très doué. (...) D’abord, la laïcité, ce n’est nullement « la séparation du temporel et du spirituel » comme tu l’écris. Le « spirituel » et le « temporel », ce sont des notions théologiques, et cela connotait des pouvoirs. (...) En laïcité, seul « le peuple » est souverain, et donc le seul « pouvoir » est le pouvoir politique qui émane de lui. (...) » (5)
Morts pour la France
« Tu fais preuve d’une curieuse obsession des minarets et tu sembles assez ignorant à ce sujet. Pour être concret, je vais te raconter l’histoire de France en la reliant à ma propre histoire d’ancien Français, du temps où toi, tu ne l’étais pas encore. Pendant la guerre 1914-1918, mon arrière-grand-père est mort au front, comme, malheureusement, beaucoup de Français, de diverses régions : Algérie, Savoie, ou Limousin,...Car nous avons été environ 100.000, oui cent mille, musulmans à mourir au combat pour la France. Nous étions déjà tellement « arrivés » en France, que nous y sommes morts ! Ces combats avaient lieu dans cette partie de la France appelée « métropole ». Ma famille y était venue, à cette occasion, et elle y est restée. A Paris, précisément. Comme nous commencions à être assez nombreux, et provenant, outre la France, de différents pays, la République laïque a eu une très bonne idée : construire une mosquée, avec un beau minaret bien sûr. Elle avait décidé, en 1905, de « garantir le libre exercice du culte ». « Garantir », c’est plus que respecter. C’est prendre les dispositions nécessaires pour assurer son bon fonctionnement. Pourquoi passes-tu tant de temps, dans ton texte, à nous parler des minarets ? (...) De plus, et je vais t’étonner Nicolas, les laïques, ils aimaient bien les minarets. Quand on a posé la 1ère pierre de la mosquée, le maréchal Lyautey a fait un très beau discours. Il a déclaré : « Quand s’érigera le minaret que vous allez construire, il montera vers le beau ciel de l’Ile de France qu’une prière de plus dont les tours catholiques de Notre-Dame ne seront point jalouses. » (5)
Belle lettre en vérité de monsieur Jean Bauberot (Mouloud pour les besoins du plaidoyer) qui permet de situer les véritables enjeux. Ceci dit, ce plaidoyer pour la tolérance pourrait être complété en ajoutant que la paix entre l’Eglise et la République est venue en partie d’un modus vivendi : la République ayant laïcisé les attributs de l’Eglise. Ainsi sur les 11 jours chômés dans l’année 9 sont à caractère religieux- on se souvient du tollé provoqué par la proposition de la commission Stasi de permettre que l’Aïd el Kebir et la fête juive du Kippour soit déclarées fêtes nationales chômées et payées. Point n’est besoin de les « identifier ». Les Musulmans de France dans leur immense majorité veulent vivre avec dignité leur culture. Ils connaissent les fils rouges à ne pas dépasser, ils savent ou ils doivent savoir qu’ils sont dans un vieux pays de tradition chrétienne. Pourtant leur identité religieuse n’est nullement un frein à leur patriotisme.
Pour rappel les Algériens qui montaient à l’assaut de la colline de Wissembourg avant la débâcle de Sedan en 1870, outre le fait qu’ils y ont décimé pour conquérir un bout de colline et y planter le drapeau français étaient des musulmans à part entière et des patriotes – à leur corps défendant à part entière - , il fut de même de ceux qui eurent à combattre les Allemands dans l’enfer de Verdun ; on les gavait de vin eux les musulmans !! - d’où l’expressionaboul gnole - devenu plus tard bougnoule un sobriquet démonétisant l’indigène. Les descendants de ceux qui sont morts pour la France ont choisi de vivre en Europe, ils souhaitent le faire dans la dignité. Ils veulent vivre d’une façon apaisée et sans ostentation leur spiritualité à l’ombre des lois de la République. Ce débat sur l’identité outre le fait qu’il débouchera sur un non lieux risque de remettre aux calendes grecques "ce désir de vivre ensemble" dont parle si bien Renan.
Pr Chems Eddine CHITOUR
Ecole Polytechnique Alger enp-edu.dz
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Monday, June 20, 2011

"Le Monde Magazine" : Mayas, autodestruction d'une civilisation - LeMonde.fr


"Le Monde Magazine" : Mayas, autodestruction d'une civilisation

Tikal, une des plus grandes cités mayas de la période classique, a perdu 90 % de sa population en moins de deux générations, au IXe siècle.
Tikal, une des plus grandes cités mayas de la période classique, a perdu 90 % de sa population en moins de deux générations, au IXe siècle.RD Hansen/Fares
Des pyramides gigantesques perdues dans la forêt pluviale ; des temples oubliés envahis par la végétation ; d'imposants blocs de calcaire renversés par les racines d'arbres centenaires. Les images d'Epinal de cités majestueuses reprises par la jungle et la nature sauvage en ont fait l'une des plus captivantes énigmes archéologiques. Pourquoi, vers 850 de notre ère, la civilisation maya classique a-t-elle sombré ? A quelle catastrophe ou quel enchaînement d'événements peut bien tenir ce qui nous semble la fin d'un monde ? En quelques décennies, les dynasties s'éteignent, des centaines de cités-Etats se vident de leur population, des régions habitées pendant un millénaire voient leurs habitants partir pour ne plus revenir. Le pourquoi et le comment de cet effondrement seront au cœur d'un colloque international organisé au Musée du quai Branly les 1er et 2 juillet, dans la foulée de l'exposition "Mayas, de l'aube au crépuscule".
Il faudra cependant plus d'un colloque pour trancher ces questions. Elles hantent les chercheurs depuis presque un siècle, sans qu'aucun consensus ne se dégage. Bien sûr, certaines théories n'ont plus guère de partisans : épidémies fulgurantes, "invasions barbares", tremblements de terre en série… Toutes les causes simples et exogènes sont désormais écartées de manière quasi certaine. Reste une combinaison de facteurs régulièrement invoqués : sécheresses en cascade, remise en cause du statut des rois, récurrence de conflits meurtriers entre les principales cités-Etats qui se partagent, via de complexes systèmes d'allégeance, la grande région centrée sur l'actuel Guatemala.
Chaque cité semble avoir vécu une agonie particulière. Ici, la guerre a été prépondérante. Là, une forte baisse des rendements agricoles a peut-être primé. Ailleurs encore, le détournement de voies commerciales a pu avoir son importance… "Mais le problème, à se dire qu'un grand nombre de facteurs régionaux ont ainsi été impliqués, c'est que nous avons quand même bien affaire à un effondrement généralisé, rappelle Dominique Michelet (CNRS, université Paris-I), qui a dirigé pendant une décennie les fouilles de Rio Bec, au Mexique. Toutes les cités-Etats des basses terres s'effondrent dans un laps de temps assez court. Il faut tenir compte du caractère global de ce phénomène." Manquerait donc au moins une pièce au puzzle.
Pour Richard Hansen (université de l'Idaho), "un effondrement est toujours causé par plusieurs facteurs". "Mais la particularité d'un tel effondrement est que la population, une fois qu'elle a quitté les centres urbains, n'y revient pas, ajoute l'archéologue américain. Cette absence de toute réinstallation ne peut être le fait que d'une dégradation de l'environnement : les gens ne reviennent pas simplement parce qu'ils ne le peuvent pas. Aujourd'hui, si personne ne retourne vivre à Tchernobyl, c'est parce que l'environnement ne le permet pas."
DES INDICES SAISISSANTS

Une jarre miniature remplie de perles et de coquillages a été découverte au pied d'un édifice de Naachtun. C'est une offrande d'abandon des lieux faite par les habitants.
Une jarre miniature remplie de perles et de coquillages a été découverte au pied d'un édifice de Naachtun. C'est une offrande d'abandon des lieux faite par les habitants.Projet Naachtun
Comment une ville se vide-t-elle ? Les fouilles franco-guatémaltèques menées depuis deux ans sur le site de Naachtun, dans l'extrême nord du Guatemala, commencent à donner quelques indices saisissants. Et assez contre-intuitifs. Dans la phase la plus tardive de l'occupation de la ville, entre 800 et 950 de notre ère, certaines populations, sans doute des familles nobles, se regroupent dans le centre de la cité, dans des habitations construites autour de plusieurs patios.
Un édifice de prestige – une pyramide quasi verticale d'une quinzaine de mètres de hauteur – surplombe ce complexe. Or, en la dégageant, les archéologues réalisent qu'elle n'est pas fonctionnelle : il y manque l'escalier qui doit permettre de monter au sommet, sur la plate-forme. Manque, également, le temple sommital. "Le bloc maçonné sur lequel devait s'appuyer l'escalier est bien là, mais la pose des marches n'a pas eu lieu", dit Dominique Michelet, qui a fouillé le secteur. Mieux : en dégageant la base de l'édifice, les chercheurs découvrent au pied de l'escalier inachevé, raconte Philippe Nondédéo (CNRS, université Paris-I), le directeur de la mission, "une jarre miniature en céramique, remplie de perles de coquillages spondyles". Cette manière de placer un objet de valeur au pied d'un édifice sur le point d'être abandonné relève d'un rituel bien connu des spécialistes : c'est une "offrande d'abandon", déposée dans le cadre d'un rituel, sorte d'ultime offrande au monument qui entre en déshérence. Non seulement le chantier de la pyramide n'a pas été mené à son terme, mais ses commanditaires en ont pris acte en l'abandonnant rituellement, selon la coutume.
"Cela signifie deux choses, explique Philippe Nondédéo. D'une part, les habitants n'ont pas quitté la cité dans la précipitation ou la panique : dans l'un des palais de la ville, nous avons aussi découvert de grands encensoirs, brisés dans le cadre d'un autre de ces rites d'abandon. D'autre part, au moment où ils semblent quitter les lieux, ils ont encore accès à des biens de grande valeur." Les presque cinq cents perles "offertes" à la pyramide inachevée proviennent en effet de la côte Pacifique, à quelque 500 kilomètres de là.
Ce n'est pas le seul élément indiquant la prospérité de la cité jusque tard dans son histoire. "On a également trouvé de l'obsidienne de Zaragoza et d'Otumba, gisements situés à plus de 1 200 kilomètres de Naachtun à vol d'oiseau !", ajoute Dominique Michelet. Des aiguillons de raie – utilisés dans les rituels d'autosacrifice, au cours desquels des nobles faisaient couler leur sang en se perçant la langue ou le pénis –, des céramiques importées, du jade, des meules en granit du Belize… Même à son crépuscule, Naachtun continuait de disposer de toutes sortes de biens précieux.
FUITES EN MASSE
A l'image de Naachtun, certaines villes semblent avoir été abandonnées en bon ordre. On part en ne laissant que peu de choses derrière soi. Ce n'est pas le cas partout ailleurs. Plus au sud, des régions semblent en proie au chaos qui suit de près les conflits armés. Dès le milieu du VIIIe siècle de notre ère, avant que ne s'effondre le reste de la région, les cités d'Aguateca, Dos Pilas et Cancuén sont ravagées par la guerre. Leurs populations fuient en masse.
"A Dos Pilas, la population démantela elle-même une grande partie de ses propres temples et palais dans une tentative désespérée d'ériger des barricades de pierre, mais en vain, car la cité fut détruite, écrit Arthur Demarest (université Vanderbilt), dans sa contribution au colloque. Non loin, le centre d'Aguateca se dressait sur un escarpement quasi imprenable, bordé, d'un côté, de falaises et d'un abîme, et, de l'autre, de kilomètres de murailles. Cette cité résista plus longtemps, mais finit par être prise et brûlée vers l'an 800." "Plus au sud, sur les rives du fleuve de la Pasión, le riche port de commerce de Cancuén, florissant entre 750 et 800, fut à son tour détruit, ajoute l'anthropologue américain. Son roi, la reine et plus de trente nobles furent assassinés dans un grand rituel à l'issue duquel leurs corps, revêtus de leurs plus beaux atours, furent déposés dans une citerne sacrée."
Entre Naachtun et Dos Pilas, Aguateca ou Cancuén, il semble n'y avoir rien de commun. D'un côté, une population riche qui certes se rétracte dans le centre de la ville, mais qui continue à jouir d'un certain luxe et semble quitter les lieux sans précipitation. De l'autre, la guerre, la mort, le chaos. A Naachtun, les hommes abandonnent la ville relativement progressivement ; ailleurs, les populations paraissent parfois s'être évanouies avec une incroyable rapidité. "Des études de densité de l'habitat ont suggéré qu'à partir de 830 environ, Tikal [l'une des plus grandes cités des basses terres] perd 90 % de sa population en moins de deux générations", illustre Charlotte Arnauld (CNRS, université Paris-I). Comment imaginer une cause sous-jacente, commune à des situations si radicalement différentes ?
Le sommet du temple du Jaguar, à El Mirador, la plus grande cité maya préclassique, tombée vers 150. Le bas de la pyramide se trouve 17 mètres sous la terre.
Le sommet du temple du Jaguar, à El Mirador, la plus grande cité maya préclassique, tombée vers 150. Le bas de la pyramide se trouve 17 mètres sous la terre.Charles David Bieber/Fares 2005
Peut-être, pour comprendre la chute des Mayas classiques, faut-il remonter le temps de quelques siècles. Et analyser une autre crise, bien plus ancienne, celle de 150 après J.-C.. Car l'effondrement de la civilisation maya classique, vers l'an 850, n'est pour certains spécialistes rien de plus que la répétition d'un autre effondrement : celui de la période maya dite préclassique, commencée en 1000 avant J.-C.. Ainsi, lorsque Naachtun est désertée vers 950, d'autres cités alentour sont déjà abandonnées depuis huit siècles. Déjà ruinées et déjà partiellement recouvertes par la forêt. La crise des années 150 demeure toutefois localisée : elle est limitée à la région d'El Mirador, du nom du plus grand centre urbain de cette zone de l'extrême nord guatémaltèque, toute proche de Naachtun.
Qu'apprend-on de cet effondrement antérieur, celui des Mayas préclassiques ? D'abord que l'histoire des sociétés humaines n'est pas celle d'une croissance constante, d'une amélioration continue des réalisations techniques. Dans le monde maya, rien n'égalera en taille les monuments d'El Mirador, rien ne surpassera le gigantisme de son architecture. La pyramide dite La Danta, la plus grande du site, culmine à plus de 70 mètres. Elle excède en volume la grande pyramide égyptienne de Gizeh et compte au nombre des plus vastes édifices jamais érigés. Dans la région d'El Mirador, au cours de la période préclassique, tout semble avoir été construit à l'aune de cette démesure. Déjà, les grandes villes de la région – El Mirador, mais aussi El Tintal, Nakbe, Wakna – étaient connectées par "un réseau de chaussées pavées larges d'une vingtaine de mètres, surélevées de 4 à 5 mètres et qui pouvaient raccorder des centres distants d'une vingtaine de kilomètres", dit Philippe Nondédéo. A son apogée, El Mirador a pu compter des dizaines de milliers d'habitants.
STUC DESTRUCTEUR
Au milieu du IIe siècle, ceux-ci quittent les lieux en masse. Et n'y reviendront que très partiellement, après de longs siècles. Pourquoi ? "Je ne crois pas que la guerre puisse pousser les populations à partir et à ne jamais revenir : la guerre peut susciter un abandon momentané, pas un effondrement,estime Richard Hansen, qui fouille El Mirador depuis les années 1980. Pendant la seconde guerre mondiale, Dresde, Tokyo ont été bombardées, Hiroshima et Nagasaki ont chacune reçu une bombe atomique… Or toutes ces villes sont aujourd'hui assez bien peuplées !" Pour l'archéologue américain, il faut chercher ailleurs les causes de l'effondrement des Mayas préclassiques. "Il faut bien comprendre que ce qui a permis l'extraordinaire succès des Mayas, c'est leur système agricole, ajoute M. Hansen. Dans la région d'El Mirador, ils utilisaient la boue des marécages sur de grandes cultures en terrasse : ils pouvaient ainsi cultiver la même terre pendant des centaines d'années sans l'épuiser."
Selon l'archéologue américain, quelque chose est donc venu perturber cet astucieux système. Les fouilles montrent que les boues de matières organiques utilisées comme fertilisants sont aujourd'hui parfois ensevelies sous un à deux mètres d'argiles. De tels enfouissements des sols n'ont pu être provoqués que par l'érosion due à une déforestation massive. "Je pense que ce qui a suscité cette déforestation n'est pas l'agriculture, mais plutôt la production de stuc." Tout au long de la période préclassique, à mesure que les siècles passent, les parements de stuc qui recouvrent les murs des monuments, des maisons, voire le pavement des chaussées, s'épaississent. Les signes ostentatoires de richesse et de pouvoir de la classe dirigeante se paient en stuc. Donc en arbres. Car cet enduit, qui permet de recouvrir les maçonneries grossières, s'obtient au prix d'un long chauffage du calcaire, très coûteux en bois.
Une tête en stuc de l'époque classique. La production massive de ce matériau serait à l'origine de l'effondrement de la civilisation préclassique.
Une tête en stuc de l'époque classique. La production massive de ce matériau serait à l'origine de l'effondrement de la civilisation préclassique.Ricky Lopez Bruni/www.rickylopezbruni.com
Ce défrichage de grande ampleur aurait donc endommagé quasi irréversiblement l'environnement de la région, ruinant ainsi le système agricole qui assurait aux populations leur prospérité. Bien que localisé, cet effondrement des Mayas préclassiques préfigure-t-il celui intervenu sept siècles plus tard sur l'ensemble des basses terres ? De troublantes analogies existent. Comme sur le site de Copan, sur le territoire actuel du Honduras, où l'archéologue David Webster a montré que, dès le viiie siècle, les glissements de terrain dus à la déforestation ont peu à peu oblitéré les capacités de production des paysans aux abords de la cité. "C'est une situation que l'on ne retrouve pas forcément ailleurs et il ne faut donc pas généraliser", tempère Charlotte Arnauld. Mais, malicieusement, cette dernière fait remarquer que les derniers grands monuments de la période classique, érigés peu avant l'effondrement, sont constitués de petits blocs de calcaire, plus petits et bien mieux taillés que ceux utilisés dans les siècles précédents et bien plus soigneusement ajustés les uns aux autres.
"Peut-être précisément pour économiser le stuc", avance-t-elle. Et donc pour économiser le bois, signe qu'il commençait sérieusement à se faire rare… La déforestation massive pratiquée au cours de la période classique a sans doute eu d'autres répercussions. Sur les pluies : les climatologues savent aujourd'hui que l'absence de végétation peut entraver les précipitations. Des analyses de carottes sédimentaires ont montré qu'entre 760 et 910, quatre vagues de sécheresse de trois à neuf ans chacune ont frappé de vastes zones de l'aire maya. Or dans un système politico-religieux où le roi est le garant de la clémence des éléments, ces calamités à répétition ont peut-être déstabilisé les élites et engendré des troubles politiques.
FIN D'UN SYSTÈME
Des troubles dont l'une des plus saisissantes illustrations est une découverte faite par l'équipe dirigée par Charlotte Arnauld au début des années 2000, sur le site de La Joyanca, dans le nord-ouest du Guatemala. L'un des bâtiments, tout en longueur – plus de 50 mètres –, est juché au sommet d'un escalier qui conduit à une grande pièce. Sans doute s'agit-il d'une salle d'audience pourvue d'une banquette, située au milieu – de toute évidence celle du roi. Bâtiment politique par excellence, ce long édifice a connu des cloisonnements internes pendant son occupation (entre 750 et 850), jusqu'à comporter six pièces au milieu desquelles le souverain perd sa singularité. Donc sans doute une partie de son pouvoir. Lorsqu'ils dégagent l'édifice, les archéologues trouvent, dans la pièce centrale du roi, le squelette d'un homme, ou d'une femme, jeté là sans ménagement ni sépulture, vraisemblablement à dessein, avant que la banquette royale ne soit enlevée et le toit du bâtiment volontairement abattu…
S'agit-il du souverain ? Pourquoi aurait-il été tué ? "On ne le saura jamais, admet Charlotte Arnauld. Mais cela n'ôte rien à la violence des actes qui se sont déroulés là, dans une enceinte dévolue au roi." La fin de la période classique est aussi la fin d'un système de royauté sacrée. Au nord des basses terres centrales désertées, dans la péninsule du Yucatan où les Mayas feront revivre de grandes cités dès le XIe siècle, une nouvelle forme de gouvernance apparaît. Un système pour lequel un mot maya existe, multepal : "gouverner ensemble".
  • A voir "Maya de l'aube au crépuscule". Musée du quai Branly, 37, quai Branly, Paris-7e. Tél. : 01-56-61-70-00. Du 21 juin au 2 octobre 2011. Colloque "Sociétés mayas millénaires : crises du passé et résilience", au Musée du quai Branly. Les 1er et 2 juillet. Entrée libre dans la limite des places disponibles.
Stéphane Foucart

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